20/02/2019

Prémices du printemps en Italie du sud 🇮🇹

Nous débarquons du bateau avec un peu de retard, sans trop savoir de quel côté trouver la sortie du port. Bien que nous ayons plutôt bien dormi, il nous faut retrouver quelques repères ! Le passage de la douane est très rapide, c’est notre premier Bongiorno ! On traverse les rues de Bari avec nos sacs à dos, sous le soleil italien. Les rues sont propres et le klaxon n’est pas trop utilisé. Les scooters s’arrêtent même aux feux rouges ! Sommes-nous bien en Italie ?! Notre hôte nous conseille une « boulangerie » et un « glacier » que l’on teste dès le midi. Notre première moitié de pizza enveloppée dans du papier mangée en marchant dans les petites rues du borgo de Bari est un délice. Ensuite, on mesure notre chance en dégustant notre glace achetée un peu plus loin, ce premier jour ensoleillé de février. 6€ dépensés pour ce premier repas dans un pays si gourmand, on sent qu’on va se régaler ! Nous poursuivons notre balade en visitant l’église de Saint Nicolas et sa crypte. Les murs nous semblent bien moins chargés que d’habitude... c’est normal : on a quitté le monde orthodoxe ! Le plafond est quand même superbement décoré. Le soir, on n’hésite pas longtemps pour tester une pizzeria du coin. Installés sur une mezzanine, on a une vue imprenable sur les pizzaiolos et l’organisation du service. Notre serveuse nous donne des conseils dans un anglais hésitant et charmant. On se régale à nouveau. Pas questions de partager la pizza ici. Il faut stopper instantanément cette habitude prise en Amérique du Nord et en Russie si l’on ne veut pas subir l’inquisition des locaux ! Même les enfants à côté de nous finissent la leur...




Nous récupérons une voiture à l’aéroport de Bari pour être autonomes dans nos déplacements. Direction une autre ville du bord de l’Adriatique : Trani. On longe la mer, en passant dans les villages vivants et ensoleillés. Il y a quand même pas mal de circulation, et ce n’est pas facile de se garer. Chanceux, on trouve une place dans une petite rue juste à côté de notre B&B ! De travers sur un trottoir mais comme toutes les autres voitures ! La découverte des rues étroites et des nombreuses arches de Trani nous prends l’après-midi suite à un bon plat de pâtes sur le port. Malgré le soleil et la température clémente, la mer est assez agitée. Au milieu des joggeuses et des perruches (aucun jeu de mots, il y avait de vraies perruches vertes dans les arbres du parc !), nous nous posons en regardant les vagues se fracasser sur les remparts de la ville. Le soleil se couchant plus tard, nous partons à l’assaut du château octogonal de Castel del Monte. Le vent s’intensifie et on manque de s’envoler en faisant le tour de ce fort à géométrie parfaite. De retour à Trani, il n’y a personne dans les restaurants du port. On se dit que le repas n’est peut-être pas servi avant 21h comme en Grèce... Mais non, tous les italiens sont autour de la place centrale. Ici ça boit, ça mange et on nous propose de revenir 30 minutes après pour avoir une table car la salle est comble. Pas déçus de l’attente, on se régale à nouveau de pizze en buvant une bière locale.




Le lendemain, on part tôt pour la péninsule du Gargano. Le petit déjeuner inclus dans le B&B est servi dans un café voisin au logement. Le nom italien colazione indique bien la frugalité de ce que l'on ne peut pas qualifier de repas. Il s'agit simplement d'un café accompagné d'une viennoiserie. Il est par contre très difficile d'avoir un croissant nature. On entend par là, sans Nutella, crème patissière et sans confiture. Quand nous demandons cela au tenancier, il attend la suite avec un air interrogatif... Parfois on se laisse convaincre, parfois on tient bon ! Après cette collation, nous longeons la mer et les lagunes de sel avant d’arriver aux pieds des falaises. La visite de la Basilica di San Michele Arcangelo nous enchante. Une messe est en cours quand nous découvrons la grotte principale. Cette roche énorme au dessus du chœur impose le respect. Une autre grotte nommée capella della Riconciliazion (c’est facile à comprendre, l’italien, hein ?) est beaucoup moins animée. Ne voyant pas comment rejoindre le musée, nous demandons à un monsieur qui nous ouvre les portes du musée qui donne accès à la première grotte. On est seuls tout au long de la visite, c’est super. On nous prête même une télécommande pour choisir la langue d’un descriptif sur haut-parleurs. Après une part de pizza mangée en parcourant la ville, Médy nous conduit à l’Abbazia di Pulsano. C’est un monastère à flan de falaise, entre deux canyons. En marchant on découvre les nombreux hermitages troglodytiques dans les falaises. Le décor est magnifique. On ose entrer dans une zone de silence pour découvrir une nouvelle grotte aménagée en une impressionnante église. Lieu de réunion, les chaises sont équipées de la même tablette qu’en salle Dunant au centre Richelieu de La Rochelle ! La reste de la journée est réservé à la foresta Umbra. On s’y perd dans les chemins retournés par des sangliers. Le soleil s’enfonce déjà dans la mer quand nous arrivons à Peschici. La route zig-zague le long de la falaise, le ciel nous fait le spectacle en se reflétant sur la mer.


Nous quittons la ville de Trani le lundi 4 février sans en avoir visité la basilique qui semblait à ne pas manquer. En basse saison, les horaires d’ouverture ont l’air bien souples. En parlant de souplesse, la conduite en Italie du sud (et comme en Grèce d’ailleurs) nécessite une grande agilité mentale. Même si une vigilance constante est nécessaire pour éviter toute percussion, c’est l’acceptation de l’« organisation » locale qui permet de tenir dans le temps. Dans les milieux professionnels, il est souvent question d’agilité des organisations passant par celle des personnes. On a la solution ! Venez conduire en Italie du sud et quand vous êtes à l’aise, vous avez quelques bases d’agilité !


Matera, Ma terre ... Tout le monde nous a conseillé de voir Matera. Vu le nombre de choses conseillées par le guide du routard, on y a réservé 3 nuits soit deux jours entiers. Sur le chemin, nous nous arrêtons à Gravina in Puglia, qui a aussi l’air d’une ville pleine de surprises. Nous y avons réservé la visite de souterrains prévue à 15h. Nous nous renseignons à l’office de tourisme pour connaître les heures de visite de certains sites, on est embarqués de suite par un guide de la ville qui nous ouvre les portes d’un des trésors de Gravina : une église rupestre. Il nous parle aussi de la langue du coin, faite des diverses occupations au cours des siècles et bien différente de l’Italien. Cela nous fait penser au patois bretons, au basque, à l’occitan... Ici cette langue est encore très utilisée, même par les jeunes. Notre guide est donc au moins trilingue, vu son bon niveau de français ! Les paroies de l’église sont recouvertes de fresques qui ont traversé le millénaire. Un peu plus loin, ce sont des centaines de crânes et ossements entassés qui nous surprennent. Ils viennent d’une fosse commune utilisée en dernier lors de l’invasion des sarrasins. On est en contrebas de la ville et la rivière coule fort, ça résonne un peu avec les paroles de notre guide qui explique les coutumes et fêtes liées à ce lieu important. L’utilité des grottes pour les résistants lors de la seconde guerre mondiale. Ça y est, la magie des grottes s’est emparée de nous, et ne nous quittera plus pour les 4 jours à venir.


Après un tour dans la ville, nous traversons un pont qui nous mène de l’autre côté du ravin. On y voit la ville entière mais aussi quelques ruines et un cimetière. Nous n’avons pas encore trouvé de restaurant ouvert, et quelques gouttes commencent à tomber lorsqu’un renard traverse la ruelle. C’est une Osteria qui nous met au chaud en nous proposant un antipasti + primi pasti que nous acceptons avec plaisir. Le pain est fait avec les céréales d’ici, il est sans gluten, et pourrait correspondre au gra (grain) de Gravina. On se régale sans goûter à la deuxième partie du nom de la ville ;)
Il pleut à torrent quand nous sortons de la taverne. On pense à Hydra (voir l’article en Grèce) en sautant de pavés en pavés. Nos guides sont pourtant là. Un qui parle parfaitement français, l’autre qui surveille l’entrée du souterrain. On découvre le sous-sol creusé à coups de pioches. C’est impressionnant ! La citerne récoltant l’eau de pluie, celle où l’on écrasait les grains de raisin pour le vin, celle où les tonneaux étaient conservés, le garde manger et finalement, la plus profonde où l’extraction des pierres a l’air de s’être suspendue du jour au lendemain. On comprends que toutes les maisons ont ces souterrains, qui sont abandonnés depuis les années 60. L’association assurant les visites a fait un énorme travail de nettoyage, sécurisation et mise en valeur ! On repart sous la pluie et heureux de ces découvertes, sans se douter de l’introduction parfaite de Gravina à Matera.


Le déluge n’a pas cessé de l’après-midi. Si bien que la route se retrouve par moments complètement submergée. L’eau refoule des bouches d’égouts et pour une fois, les italiens ne roulent pas à toute vitesse. Nous arrivons tout de même et nous garons dans une micro ruelle comme tout le monde. Il nous est quand même nécessaire de faire une marche arrière sinueuse quand la rue atteint une largeur inaccessible. On se rend compte que le B&B que nous avions réservé est vraiment bien placé. Ruelle propre et calme juste à l’entrée du sasso Caveoso.


Il est difficile, par écrit, de retranscrire les émotions qui nous ont été procurées par la découverte de Matera. Tout d’abord, la zone qui concentre les attraits touristiques est composée de deux sassi. Ce sont des quartiers semi troglodytes et semi construits avec les pierres extraites. Ils sont chacun dans une ravine séparée et se repartissent des deux côtés d’une butte. Leur doux noms sont Caveoso et Barisano, à prononcer avec l’accent italien bien entendu ! Les deux sassi débouchent sur la même grande ravine au delà de laquelle on aperçoit quelques grottes et églises. Mais bien plus éparses que du côté de la majeure partie de la ville. Car l’une des composantes fortes de Matera est l’enchevêtrement de ruelles, maisons, grottes, terrasses et églises dans tous les sens et sur tous les niveaux. Tout cela donne malgré tout un aspect homogène en matière du fait de la même roche utilisée partout. Quand on pénètre dans les maisons-musées, on imagine le travail nécessaire à l’extraction des pierres. C’est aussi un bon moyen de découvrir le mode de vie des habitants jusque dans les années soixante.



Les cavités sont systématiquement de forme voûtée pour une raison structurelle évidente. La plupart des maisons étaient équipées de citernes collectant l’eau de pluie. La présence de ces réservoirs est justifiée par la porosité du sol calcaire de la région. La rivière coulant au fond du ravin transporte une grande quantité de boue lors de notre passage. Et on imagine aisément qu’en été la rivière doit être facilement à sec. Cette absence d’eau propre à la consommation en surface rend la collecte des eaux de pluie indispensable. Les citernes sont toutes recouvertes d’un enduit étanche datant, au minimum, de l’antiquité. Son nom, qui nous sera rappelé plusieurs fois par la suite, est cocciopesto. Mais il y a une citerne qui se démarque des autres. Sous la place principale, se trouve une réserve publique disponible pour l’ensemble des habitants. Les dimensions de la cathédrale de l’eau sont le résultat du rassemblement de nombreuses citernes privées pour l’utilisation de tous. La guide nous parle des récits de sa grand-mère avec beaucoup d’émotion. Cette dernière avait fait partie des dernières utilisateurs des puits publics avant l’arrivée de l’eau courante par aqueduc. Tout le monde avait alors conscience de la capacité du réservoir sans jamais en connaître la position exacte. Puis son existence était devenue un mythe de par son inutilité et la suppression des puits qui en indiquaient la position. Ce n’est que dans les années 2010 que des travaux de fouilles ont été entrepris. Un aménagement a ensuite été réalisé pour nous permettre de rentrer dedans. L’organisation anarchique contraste avec la citerne bien régulière d’Istanboul visitée par Médy 13 ans auparavant.


La ville regorge d’églises. Les plus atypiques sont celles qui sont creusées dans la roche. Certaines d’entre elles sont décorées de peintures rupestres remontant jusqu’aux environs du 9ème siècle. L’état de conservation est parfois saisissant. C’est le cas de la fresque sur le péché originel dans une grotte à quelques kilomètres du centre. Certaines églises font également office de lieu d’exposition pour l’année 2019. Car Matera est capitale européenne de la culture cette année là ! Des lieux singuliers se retrouvent ainsi à accueillir des œuvres d’art tout aussi singulières. C’est le cas de l’exposition Dalí dans la chiesa rupestre di Madonna delle Virtù. L’élection de la ville en tant que capitale de la culture a fait l’objet d’une vidéo de présentation de la ville plutôt intéressante. Nous la visualisons dans une grotte / maison d’exposition. C’est un bon moyen pour nous de comprendre la vie dans les sassi au fil des siècles. Et surtout qu’est-ce qui fait le caractère unique de la ville et sa population. Une bonne synthèse est disponible sur le site de l’UNESCO pour expliquer les raisons de son classement au patrimoine mondial : ici.


Comme vous l’avez peut-être remarqué si vous avez visité le site précédent, l’établissement des humains à Matera remonte à plus de 2000 ans. L’aspect de la ville et sa population millénaire créent beaucoup de ressemblance avec la Cisjordanie. Ceci est extrêmement bien mis en avant au palais Lafranchi. Une exposition photos très bien faite capte joliment les rapprochements possibles entre Pétra ou Bethlehem et Matera. Notre découverte des habitants et habitations des sassi est ponctuée par de belles découvertes de bars, restaurants, cafés, ... La plupart des restaurants que nous choisissons se trouvent dans des grottes. Tous les soirs, nous nous enfonçons donc dans les profondeurs de la terre pour goûter de nouveaux plats locaux. Il y en a d’ailleurs un bon nombre à base de pois que l’on a rarement l’habitude d’associer avec des pâtes. Après deux jours entiers sur place, il est temps pour nous de retourner à Bari et de rendre la voiture de location. La prochaine étape étant la ville de Naples, il n’est pas nécessaire de tenter le diable en y pénétrant en voiture ! Nous faisons tout de même face à un dernier test sur la route du retour. La voie rapide est stoppée instantanément sans aucune signalisation. Tout le monde tourne dans tous les sens, semi-remorques inclus. Le GPS n'est plus vraiment utile puisqu'il ne connait pas la moitié des voies existantes. Nous nous en sortons au talent, pour conclure la location de notre petite voiture.


Notre arrivée à Napoli se fait en bus. Les voitures se faufilent dans tous les sens, notre chauffeur est obligé de s’arreter pour pousser un conducteur trop lent à coups de klaxon. Quelques secondes après, le gêneur trouve un endroit où se faufiler. Une passagère dit alors : « capito ! bravo ! complimenti ! » C’est bon, nous sommes bien arrivés à Naples ! Le reste de la soirée est sur les thèmes de la musique. L'accordéon dans le métro, le saxophoniste depuis notre superbe chambre. C’est Marco, un vieil ami de Fabio, l’ami de Médy (napolitain de naissance et rochefortais d’adoption) qui nous accueille dans la capitale du sud. Il nous indique tous les endroits à visiter, mais surtout où manger ! Notre première pizza napolitaine est chez Brandi. Ce n’est pas moins que le lieu d’invention de la pizza Margarita ! On se dit qu’on risque de rentrer obèses... Surtout avec les délicieux petits déjeuners du B&B servis par Davide le frère de Marco. Et oui, ici tout est histoire de Famille !


Nos deux premières journées à Naples sont consacrées à la visite de la ville, sur les conseils de Fabio, Marco, Davide et... du routard ! On commence par le musée archéologique, pour ne pas être trop dépaysés par rapport à la Grèce. On découvre aussi la ville souterraine, recouverte à plusieurs reprises, elle a servi et sert encore de caves aux habitants. On reconnaît pourtant bien les rues et la partie de marche dégagée par les archéologues. On marche aussi sur une ancienne décharge qui a servi d’abris pendant la guerre, ou entre des murs étroits pour s’approcher de l’eau claire. C’est sous le lit d’une maison traditionnelle qu’on a accès au sommet des gradins de l’ancien amphithéâtre...  Toute cette partie de ville avait été décimée au premier siècle, ça n’a pas empêché les napolitains de reconstruire par dessus ! On est aussi impressionnés par les liens fort avec les morts. Que ce soit en visitant les catacombes derrière l’hôpital ou la crypte du purgatoire, les napolitains ont des habitudes mortuaires bien ancrées. On croise ainsi une dame qui prie dans la rue face au soupirail de la crypte d'une église de purgatoire. Mais c’est en découvrant les cimetières de Fontanelle qu’on reste scotchés. Cet amoncellement d’os et de crânes « propres » et rangés fait une drôle d’impression !




Les ossements des personnes réfugiées au bord de la mer à Herculanum morts dans les jours qui ont suivi l’éruption du Vésuve font aussi un drôle d’effet ! C’est le 3ème jour que nous découvrons cette ville moins connue que Pompéi mais pourtant très bien conservée, grâce aux boues ardentes et à la lave qui l’on recouverte. On y entre comme on visiterait une vieille ville fortifiée, mais c’est un grand mur de lave et de boue durcies qui entoure la partie de la ville explorée. De maison en magasin, on découvre des amphores totalement conservées, des fresques et mosaïques magnifiques, des poutres calcinées encore en place... C’est assez incroyable ! Entre la gare de train et l’entrée du site, les quelques cafés ont adopté une drôle de technique pour appâter les clients. C’est le claquement des menus sous le nez des gens dans la rue. Passé l’étonnement, on rigole bien ! La météo ne permet pas de gravir le Vésuve. Tant pis, la prochaine occasion d’y monter quelques jours plus tard sera la bonne.




Nous découvrons également l'ambiance des ruelles de la ville. De magnifiques fresques recouvrent de nombreuses façades d'immeubles. Les sirènes ventripotentes nous rappellent celles d'Alice, notre illustratrice préférée (voir le lien de la page Poursuivre le voyage pour découvrir tout son travail et les sirènes sont ici). Le street art est vraiment omniprésent ce qui rend la découverte des différents quartiers très agréable. Il est impossible d'évoquer les rues napolitaines sans parler des scooters. Il zigzaguent et klaxonnent constamment. Rarement seuls sur leurs Vespa, tout le monde discute. C'est bruyant, c'est souriant, c'est vivant quoi ! Il nous est arrivé d'en voir trois, chacun sur son bolide, en train de discuter en pleine rue. Les voiturettes klaxonnent, contournent et continuent leur chemin. La quasi totalité de rues de Naples est couverte de dalles en pierre volcanique noire. Une fois polie, cette roche devient très glissante. Cela permet aux locaux de prendre les virages en dérapant pour ajouter un peu de piment à leur course. Quand les femmes prennent le guidon en main, nous remarquons qu'elles portent rarement un casque. Cela se comprend en même temps. Comment conserver des coiffures si bien arrangées avec une abomination telle que le casque ! Mais le symbole du charme et de la classe ici, ce sont les gendarmes. Les fameux carabinieri au volant de leur Alfa Roméo flambant neuve ou de leur moto BMW rutilante. Ils se retrouvent sur des places telles que la piazza Del Gesù Nuovo. Ils se font tous la bise et l'accolade. Puis retirent leur lunettes de soleil Ray-Ban ou Persol avant de rentrer dans le bar pour boire un verre de blanc. Et finalement, c'est la queue aux toilettes pour se recoiffer avant de reprendre du service. Les policiers municipaux ont la mission un peu moins glamour de courser les vendeurs à la sauvette. Ce jeux du chat et la souris fait sourire tout le monde et ne cesse jamais vraiment. En même temps, cela donne du travail à tout le monde !




Pour le dernier jour où nous logeons à Naples, il est prévu que nous visitions l’île de Capri. Cette date avait été déterminée car présentant les meilleures conditions météo. C’est un échec presque total ! On se réveille tôt, on engloutit un copieux petit déjeuner pour pouvoir encaisser les kilomètres de marche sur le rocher qui nous attendent. Puis on se retrouve à attendre le bateau de midi car les aéroglisseurs du matin ne sont pas capables de naviguer sur une mer dans cet état... Là on devrait se douter que ce n’est pas bon signe ! On choisi d’attendre en faisant une petite promenade. La mer s’avère bien agitée et le bateau est balancé dans tous les sens. Il y a même des moments qui paraissent bien longs où le navire reste dans le vide... Estelle n’est pas bien. Elle s’allonge sur une banquette libre et se masse la tête. Ça fonctionne bien, elle termine le voyage intacte. Ce n’est pas le cas de bon nombre de passagers. La traversée est ponctuée des vomissements de personnes qui ne semblent pas trop apprécier roulis et tangages ! Une fois sur l’île, nous entamons une promenade sur les flancs escarpés. Le ciel est franchement couvert et la pluie ne tarde pas à tomber. Cela fait ressortir l’odeur de certaines plantes, ce n’est finalement pas si désagréable. Le nuage passe et c’est un magnifique soleil qui nous éclaire, nous les promeneurs de l’extrême et les falaises. Mais un second nuage arrive car le vent souffle très fort ... Et celui-là ne rigole pas ! Tout s’envole. Dans la ville, chaque coin de rue est un obstacle à franchir sans glisser sur les pavés mouillés. La grêle s’ajoute à tout cela pendant quelque instants. On s’abrite dans le seul café ouvert. Malgré les mises en gardes du guide du routard, les prix sont raisonnables. C’est par ce que ce ne sont pas les prix des consommations sur place... il faut donc compter 4€ pour l’expresso et ceux qui souhaitent un gin tonic doivent aligner 14€ ! Dans le bateau du retour, nous restons dehors par précaution. La mer n’est finalement pas si agitée mais un orage éclate sur l’île. Nous sommes sauvés ... on observe les éclairs de loin.



Après 5 nuits passées à Naples dans le super appartement de la rue Chiaia, nous rejoignons la côte Amalfitaine. Pour cela, train jusqu’à Sorrento puis bus jusqu’à Amalfi. On a quasiment le train pour nous tout seuls après avoir dépassé Pompéi. Le métier de chauffeur de bus doit vraiment une saveur différente dans ce coin. La route est étroite, les virages sont serrés et la falaise est à pic jusqu’à la mer ! Le klaxon est de rigueur à chaque virage et les durs de la feuille n’ont qu’à faire des marches arrières périlleuses pour nous laisser passer. Quand c’est un autre bus ou un camion, c’est de quelques millimètres que l’on s’évite et certains passagers ne font pas les fiers. Après le mauvais temps de la veille, le grand ciel bleu est enfin de la partie ! Et il ne nous quittera plus tout au long de notre séjour dans le sud. Sur le bord de la route, plusieurs mimosas en fleur nous font penser à mutti Sylvie. Les citronniers sont nombreux et les marchands exposent des spécimens aussi gros que des melons. Sur le coup Estelle estime la taille similaire à des pastèques. Mais ça diminue jusqu’au moment de la rédaction de cet article ! Nous posons ne sacs à dos à Amalfi pour deux nuits dans l’après-midi. L’hôtel occupe un bâtiment du 16ème siècle et la déco se veut authentique. Le carrelage est fleuri et les meubles patinés occupent tous les recoins. C’est kitch mais très sympa. Et en plus, nous avons une très belle vue sur la mer depuis le petit balcon. Pour se promener dans cette ville, il ne faut pas hésiter à emprunter les ruelles minuscules. On se retrouve rapidement dans un dédale de tunnels sous les bâtisses. On s’y perd un peu, c’est très agréable. Si nous n’avions pas eu l’objectif d’emprunter un petit sentier jusqu’au village voisin, on se dit que nous ne nous serions peut-être jamais risqué dans ces venelles. Ça monte et ça descend constamment mais on se retrouve quand même rapidement à dominer l’eau bleue. Il y a un peu de vent et la mer n’est pas si calme. On peut même voir les embruns se former dans des tourbillons blancs. Le soir, au restaurant, nous faisons les frais de s'être installés dans une ville touristique. A la différence de Naples, tout est vide à 20h30. Dans le seul restaurant ouvert, les deux serveurs ont l'air en bisbille. Le plus âgé des deux a en fait passé la soirée à discuter avec les clientes de la table voisine. Le second a donc eu à gérer le reste des clients quand le premier faisait la cour à ces dames à grand renforts de limoncello.




Si nous logeons à Amalfi, c’est pour accéder rapidement au sentiero degli dei (sentier des dieux). Le bus qui nous dépose aux pieds du sentier emprunte une route encore plus sinueuse et étroite que la veille. C’est par ce que nous montons au point le plus haut du sentier pour descendre tout doucement les 6 kilomètres jusqu’à Positano. La ballade est magnifique. La vue est impressionnante. Les quelques cultures possibles ici se font en étages. Les modestes maisons et le monastère que nous apercevons sont accrochées aux rochers dans ce cadre idyllique. Les lieux ont des noms tout mimi comme la grotta biscotti. Il nous faut également franchir un monticule de terre sur une section ayant subi un glissement de terrain. Sûrement le résultat des pluies importantes de la veille. Le sentier se termine à Nocelle et le cadre est tout aussi splendide. Plus habité que le long du chemin mais avec beaucoup de charme. Nous rejoignons Positano en dévalant les 1700 marches. Nous sommes accueillis sur la route par deux belles Fiat rouge et jaune aussi minuscule l’une que l’autre. C’est l’hiver, beaucoup de bâtiments sont en rénovation. Seuls quelques commerces sont ouverts. Cela n’enlève en rien au charme de la ville et Estelle peut même tremper les pieds dans l’eau. En attendant le bus retour, nous faisons connaissance avec un couple roumain adorable. On est bien content de les avoir rencontré car il est impossible d’acheter des tickets à bord et ils en ont deux en rab.



Le 14 février, nous voilà de retour sur les pavés volcaniques de Naples avant le train pour Venise. Nous faisons un arrêt à Herculaneum pour enfin grimper le fameux Vésuve. Les temps est dégagé, c’est le bon moment. La vue est belle de là-haut. Ça nous fait un petit pincement au cœur en se disant qu’on a commencé ce long voyage par une autre terre volcanique. Le cratère a une forme bien distinctive et quelques colonnes de fumée s’élèvent par endroits. Le vent souffle fort sur la crête, il faut lutter pour ne pas être poussé au fond du trou ! De retour à Naples il nous reste deux points sur la mise des choses à faire. Premièrement, se rendre sur la place Garibaldi où Fabio a grandit et y a tenu un restaurant dans une vie antérieure. Secondement, goûter le ragù local dans au resto Tandem dont c’est la spécialité. Nous avons peur de ne pas trouver de place car c’est le jour des valentins. Vue la multitude de cœurs lumineux et autres décorations dans les rues, il semble que ce soit un jour très important ici. Nous avons finalement une table dans la rue et la température est carrément acceptable. Le ragù est délicieux, nous ne sommes vraiment pas déçus de tous les conseils de Marco.


Vendredi, nous quittons Naples avec un super souvenir de cette région. L’ambiance des rues est formidable. Nous pensons vraiment en avoir profité lors des promenades ou en poussant la porte des échoppes. Les sourires et l’authenticité des habitants nous ont aidés à se sentir bien. Que du bonheur !

13/02/2019

Du cyrillique au grec, 2 semaines en terre hellénique 🇬🇷

Le précédent article étant rédigé depuis l’auberge de jeunesse au top de Санкт Петербург (Saint-Pétersbourg), il nous restait quelques heures à passer en Russie avant d’entrer en Grèce (si vous en avez ras le bol de la Russie, vous pouvez sauter ce paragraphe !). Le retour à Москва (Moscou) en train se fait sans encombre. Sur le quai avant de partir nous discutons quelques instants avec un couple franco-russe. Elle, russe, a un sourire immense lorsque nous lui disons que nous avons passé un mois et demi sur sa terre natale. Leur train part six minutes plus tard et arrive deux heures plus tôt... De nouveau dans les rues de la capitale, une grande différence d’ambiance se fait sentir par rapport aux fois précédentes. Nous sommes le 15 janvier et les vacances sont maintenant terminées (le 1er de l’an du calendrier orthodoxe correspond à notre 14 janvier). Chalets et pistes de luges sont démontés, les rues paraissent bien vides. La place rouge semble déserte quand nous entrons dans le mausolée de Ленин (Lénine). Le moment est très particulier. Nous sommes ainsi face à cet homme qui a marqué l’histoire, embaumé et reposant paisiblement. C’est particulier également car nous ne sommes pas autorisés à nous arrêter plus de quelques secondes. Cela donne une impression de procession silencieuse dans cette boîte à la lumière tamisée. Suite à la tentative ratée de la dernière fois, on renouvelle la présentation à l’entrée de la galerie des arts européens des 19ème et 20ème siècles. Il est très agréable de se promener entre les œuvres de Monet, Degas, Van Gogh, Munch, Picasso, etc. Certains rappellent à Médy ses visites amstellodamoises, d’autres des hésitations sur le choix des visites à Oslo. Finalement, des sculptures nous font penser (!) à une galerie de Glasgow. La journée se termine à l’auditorium du théâtre Большой (Bolshoï). N’ayant pas pu avoir de représentation dans la grande salle, nous nous sommes rabattu sur du piano de compositeurs russes. À nouveau, tout le monde est bien habillé. La soirée est en trois parties et les émotions montent crescendo, le dernier volet est magnifique. Cela clos parfaitement l’épisode russe de notre voyage. Il nous faut encore un peu de temps pour digérer tout ce que nous avons aimé dans cette Russie aux multiples facettes. Ce qui est déjà certain, c’est que nous avons été subjugués !

Le changement de culture est plutôt brutal. On quitte un peuple doux et avenant pour une culture méditerranéenne quelque peu ... sanguine ! Cela commence avec un enguirlandage par une hôtesse de l’air pour une broutille. Et cela se reproduira quelques fois au cours du séjour. Malgré ce choc, nous rencontrons également des personnes au sourire éclatant de sincérité qui nous remontent le moral pour apprécier ce pays qui a beaucoup à offrir.


Il nous faut également ré-apprendre des bases dans une nouvelle langue. L’alphabet latin est absent de notre quotidien depuis maintenant deux mois et demi. Et ce n’est pas en Grèce que nous le retrouvons. Nous devons donc nous familiariser avec ces lettres que l’on utilise régulièrement en sciences et qui ont servi de base à la création du cyrillique. En entendant cette langue, on trouve beaucoup de similitudes avec l’espagnol. Principalement car ni Estelle ni Médy ne parlons espagnol, et du fait des R roulés ou différents sossotages. Peut-être aussi du fait de leur tendance à parler extrêmement fort ! Une dame rencontrée en fin de séjour évoque des sonorités slaves. Nous ne l’avions pas remarqué mais en y repensant c’est tout à fait juste ... surtout quand ils ne crient pas ! Ce n’est qu’après une bonne semaine que nous arrivons à lire le grec. C’est bien utile car sur la route, la potentielle signalétique écrite en latin se trouve généralement très proche du croisement. Avec la tendance des automobilistes à rouler vite et très proches les uns des autres, il est préférable d’avoir lu le panneau en grec se trouvant quelques mètres avant d’avoir à tourner ! D’autant plus utile que les applications GPS ne sont pas vraiment à jour en Grèce.


L’arrivée en Grèce a plusieurs significations pour notre voyage. C’est le synonyme de l’entrée dans l’Europe soit la possibilité de ranger précieusement les fragiles passeports. C’est l’entrée dans la zone euro, cette devise qui nous rappelle franchement la maison. C’est aussi la diminution du décalage horaire à une heure d’avance sur la France. Et finalement, c’est sensé nous amener des températures plus chaudes permettant de ranger gros manteaux, gants et autres équipements pour le froid. Dès le premier jour à Αθήνα (Athènes), le ciel est d’un bleu sans nuage. La température est d’environ 15 degrés ce qui nous fait ôter les pulls dès la mi-journée. Bien sûr, les grecs eux, sont en gros manteau avec un mercure à ce niveau ! Après des baklavas dans notre super studio Airbnb, en route pour se dégourdir les jambes autour de l’acropole. La vue du soleil nous fait un effet qu’on n’avait pas prévu. Nous nous régalons à déambuler entre les oliviers, théâtres et temples antiques. Les palais de Санкт Петербург (Saint-Pétersbourg) et de ses environs nous avaient permis de bien assimiler ce qu’étaient des atlantes. Ces statues d’hommes forts portant le bâtiment sur leurs épaules. On découvre, voisines du parthénon, les caryatides qui sont leur pendant féminin. Autre similitude avec la Russie, l’emploi du sifflet pour rappeler à l’ordre fumeurs, poseurs pour photos en positions inadaptées ou autre entrave au règlement.


Nous traversons le quartier de Πλάκα (Plaka) après avoir fait le tour de l’Olympion juste avant la fermeture. En raison de restrictions budgétaires, le nombre d’employés de la fonction publique a été fortement réduit. Cela mène ainsi tous les sites touristiques à fermer entre 15h et 15h30 en basse saison, nous obligeant à revoir notre façon d’organiser les journées. On visite ainsi le quartier aux ruelles étroites en découvrant les feuilletés locaux au fromage en guise de déjeuner. L’ambiance est plutôt agréable et la vue sur l’Acropole à chaque coin de rue est toujours aussi surprenante. Après le rythme des jours précédents, l’avion et la journée ensoleillée, on rentre s’essayer à une coutume locale : la sieste !


Vendredi 18 janvier, deuxième journée dans les rues d’Αθήνα, nous continuons les visites de sites archéologiques. Toujours sous le soleil, nous arpentons les Agora (grecque puis romaine) entre colonnes, sculptures en marbre et oliviers. Au milieu des stèles du cimetière antique, Médy tente d’initier Estelle au sifflotement sans grand succès. Les gravures funéraires nous rappellent évidemment celles vues en Mongolie. À la différence notable que celles-ci sont superbement bien conservées et encore plus vieilles. Mais qui sait, il suffirait peut-être d’équipes d’archéologues un peu moins accrocs à la chaleur pour faire de belles découvertes en Asie centrale... Nous terminons tranquillement l’après-midi au musée moderne de l’Acropole. Le soleil couchant offre une lumière magnifique sur les sculptures et sur la colline rocheuse au pied de laquelle nous nous trouvons. Les frontons et frises sont bien mis en valeur. Nous pensons également au bonheur d’être là sans grande foule pour profiter de ce bel endroit. Après un verre de vin à la terrasse panoramique, il est temps de rentrer se reposer. Mais avant cela, goûtons un souvlaki, spécialité grecque.



Dès le début et jusqu’à la fin du séjour en Grèce, nous nous régalons de grillades. Que ce soit des brochettes comme les souvlakis ou de la viande émincée comme les gyros. Accompagnés de pita et tzatziki, nous adorons ! Les mezzes que l’on goûte sont très bon mais pas vraiment différents de ce que l’on peut trouver en France. Sûrement plus goûteux et élaborés, mais ce n’est pas transcendant. On apprécie les yaourts dont la texture effraie un peu moins Estelle qu’en France. Avec du miel, qu’est-ce que c’est bon ! Tellement le miel d’ici est fameux, on ne touche pas une seule fois au pot importé de Russie... Il faut dire que l’on croise des milliers de ruches partout dans les campagnes. Cela nous fait penser à l’oncle de Médy, Jean-Paul. On retrouvera le produit de ses abeilles à notre retour et il n’a pas à rougir face à la concurrence méditerranéenne ! Le miel est ici décliné dans de nombreux mets. Il y a bien sûr les baklavas, mais aussi des feuilletés à diverses garnitures et d’excellents gâteaux aux oranges. Rien à voir à ce que l’on peut trouver en France. Le goût est très délicat, cela change du côté amer que l’on a généralement chez nous.



Le samedi matin, il est temps de récupérer notre petite voiture de location pour faire route vers le sud. Notre idée est de visiter le Πελοπόννησο (Péloponnèse). Nous serons obligés de revenir pour visiter d’autres lieux comme les îles de la mer Égée ou Μετέωρα (Météores). Après une sortie de la ville sportive entre scooters et doubles voir triples files, nous atteignons le canal de Κορίνθου (Corinthe). Commencé pendant la période antique, il a été terminé à la fin du 19ème siècle. La canyon ainsi creusé est différent de ceux rencontrés aux USA mais la verticalité de ses paroies sont impressionnantes ! En continuant vers Ναύπλιο (Nauplie), on fait un passage par un petit amphithéâtre antique. Nous nous retrouvons au milieu des orangers et oliviers. Certains de ces arbres ont des troncs immenses, ils doivent avoir quelques siècles derrière eux. Tout au long de notre passage en Grèce, nous sommes impressionnés par ces arbres tortueux cultivés à perte de vue. Jusqu’à être répartis en terrasse lorsque le relief le nécessite. Le lendemain à l’ouverture (et après un succulent petit déjeuner à la pension où nous séjournons), nous sommes dans le théâtre d’Epidaure. Le guide du routard indique qu’il ne faut surtout pas se laisser décourager par la file d’attente de plusieurs centaines de mètres. Nous ne comprenons vraiment pas cette remarque en arrivant aux caisses... On se retrouve donc seuls dans cet amphithéâtre vieux de plusieurs milliers d’années. L’acoustique y est remarquable et ses gradins sont extrêmement bien conservés. Médy fait une démonstration de sifflotage puis Estelle est stoppée en pleine chansonnette par le coup de sifflet de la gardienne. Le reste du site présente diverses ruines dont celles d’un bâtiment qui pourrait être le premier hospice au monde !





En descendant dans le sud de la péninsule, nous nous arrêtons dans une chapelle logée dans une grotte. Cette dernière se trouve dans une doline (cavité circulaire due à l’érosion du calcaire, que les géologues nous corrigent si il y a confusion !) où paissent quelques moutons. Les constructions sont modestes et donnent un aspect authentique au lieu. À nouveau, nous sommes seuls et c’est loin de nous déplaire. Nous arrivons vers 13h au port d’Ερμιόνη (Ermioni) et embarquons pour l’île de Ύδρα (Hydra). Au cours de l’après midi passée à crapahuter sur ce gros rocher, le ciel se noircit très dangereusement. Depuis le monastère se trouvant proche de l’un des sommets, on prend la mesure de l’orage qui nous arrive dessus. La décision est prise de redescendre au plus tôt pour se mettre à l’abris dans un café jusqu’à l’heure d’embarquer à nouveau. La pluie et la grêle sont plus rapides que nous et le parapluie ne protège pas grand chose. Estelle a un imperméable qui ne l’est plus vraiment et la doudoune de Médy n’est clairement pas résistante à l’eau ! Enfin arrivés trempés au village, la pluie qui s’était un peu calmée repart de plus belle. Nous nous retrouvons coincés sous une marquise sans pouvoir traverser la rue. En l’espace de quelques secondes cette dernière s’est transformée en torrent puissant. Le courant ne se calme pas et il est temps d’aller sur les quais pour attendre le bateau. Pour ajouter un peu de piment, nous attendons de quitter la tempétueuse île de Ύδρα pendant une heure de plus que l’horaire prévu. Nous ne sommes pas les seuls à patienter, cela nous rassure un peu ...



Il est prévu du beau temps pour la journée de lundi. Dans un premier temps, nous grimpons le presque millier de marches qui montent au château. De là nous pouvons admirer l’eau bleue de la mer où se baignent quelques courageux (ou des russes). On comprend bien l’emplacement stratégique de la fortification. Depuis les différents bastions, on a en visu toute la baie, une partie de la plaine ainsi qu’une portion de la route que nous empruntons le soir même. Suite à cette visite, nous nous rendons à Μυκήνες (Mycènes). Lieu central de la civilisation mycénienne qui a précédé la Grèce classique dès le 18ème siècle avant J.-C. Les tombeaux royaux creusés et maçonnés sont immenses. Les pierres utilisées pour le construction sont parfois en excellent état et de tailles plus que vénérables. Les vestiges de la ville révèlent une organisation très élaborée dont un approvisionnement en eau souterrain pour résister aux sièges potentiels. La porte principale de la ville est décorée de deux lions finement taillés. Le musée qui termine la visite présente une série de sculptures et objets courants. Les plus vieux objets remontent au néolithique, soit avant les mycéniens. Cette journée ensoleillée contraste franchement avec la veille. Lorsque le soir tombe, nous sommes dans les montagnes du nord du Μάνη (Magne) pour aller poser nos valises à Σπάρτη (Spartes). 



La route serpente dans la montagne. Au pied d’une paroi rocheuse, nous apercevons une construction blanche qui semble agrippée à la falaise. Il s’agit en fait du monastère Ελώνης (Elonas) que l’on ne fait qu’entrevoir depuis la grille close au fond d’une micro-route. En arrivant à proximité du col, il y a de plus en plus de sacs plastiques au sol. Au bout des quelques minutes, on se rend compte qu’il s’agit en fait de petits tas de neige ! Une fois dans le village le plus haut, la route est entièrement recouverte de neige... Et dire qu’en Russie, on a choisi la Grèce pour se rapprocher de la maison en optant pour un climat plus doux... L’adorable réceptionniste de l’hôtel s’en excuse dans un français parfait. La présence de neige dans les environs de sa ville semble lui ôter les mots de la bouche. Il est prévu que la pluie se remette à tomber dès le mardi en fin de matinée. On décide donc de se lever tôt pour prendre le petit déjeuner sur l’une des terrasses de Μωνεμβασιά (Monemvassia). Construit par les francs au 13ème siècle, la forteresse a des airs de Mont-Saint-Michel. On est d’ailleurs parfaitement placé sur la ligne imaginaire de l’épée de l’archange Saint-Michel reliant plusieurs lieux saint au travers de toute l’Europe et jusqu’à Jérusalem. Le village se loge sur les flancs d’un rocher, surplombant la mer. L’unité esthétique de l’architecture est parfaite. Toutes les maisons sont construite avec de belles pierres nues ou enduites à la chaux. Aucune voiture n’y circule et les matériaux utiles aux travaux sont amenés par des chevaux. Le dédale de ruelles est très plaisant à arpenter. On profite encore un peu du soleil avant que des nuages menaçants n’apparaissent. Il nous reste quelques mètres à parcourir lorsque les premières gouttes se mettent à tomber... Nous passons le reste de la journée à découvrir la région du Μάνη. On se croirait en Écosse ou en Irlande. Les pierres grises ont été utilisées pour monter des séparations entre les près ou les maisons. Peu d’éléments laissent penser que le tourisme est développé ici. Cela donne ainsi un aspect authentique et presque rude. Le relief est montagneux, les vagues s’éclatent sur les rochers à plusieurs centaines de mètres en contrebas de la route. Par endroits, au dessus de la mer, des trous dans les nuages laissent passer de fins rayons de soleil pour ajouter au caractère mystique du paysage. En fin d’après-midi, pour se reposer après une route difficile, nous prenons un goûter dans un café de Αρεόπόλη (Areópoli). Plusieurs personnes sont en plein débat en italien. Cela rappelle à Médy la portée de la voix de nombreux italiens de son travail et nous prépare à ce que nous rencontrerons bientôt en Italie !



À quelques kilomètres de Σπάρτη, se trouve Μυστράς (Mystras). Initialement, une forteresse a été construite par les francs suite à l’invasion de l’empire byzantin par les croisés. Cette première forteresse est posée au sommet d’un pic rocheux avec une magnifique vue sur la plaine. Il faut attendre les quelques éclaircies pour y voir quelque chose. En contrebas, des constructions byzantines se sont ajoutées et la présence ottomane a ensuite laissé des marques. Cette dernière occupation est décrite comme très permissive quant au culte des habitant du Πελοπόννησο. Les différents lieux de culte encore debout regorgent de décorations datant du 13ème au 15ème siècle, que ce soient des fresques, des bas reliefs ou autres sculptures. Aux pieds de la forteresse, nous sommes abordés par un américain suivi de deux grecs. Il est là pour rapprocher de Jésus les âmes égarées. C’est assez spécial de croiser ce monsieur dans les environs d’une cité créée suite à une croisade qui a vu des chrétiens attaquer d’autres chrétiens. En fin de journée, nous subissons une colère divine. Un énorme orage éclate lorsque nous finissons la route. On ne sait plus si c’est la nuit ou seulement le nuage qui obscurcit le ciel. Nous ne profitons pas vraiment de la vue sur la mer demandée lors de la réservation. Le vent est si fort et la pluie si violente qu’il serait bien inconscient d’essayer d’ouvrir la baie vitrée.


La journée suivante où nous rejoignons la ville de Αρχαία Ολυμπία (ancienne Olympie) est l’occasion de découvrir la montagne au cœur du Πελοπόννησο. Entre les averses légères, de magnifiques arc-en-ciel s’étendent de bout en bout dans les vallées que nous dominons. Au point culminant de la route, nous faisons halte pour visiter le temple d’Apollon. Il est en très bon état et demeure très imposant malgré la tente qui l’abrite. On l’imagine facilement imposer le respect des grecs antiques avec ses dimensions et sa position au sommet de la montagne. Nous avons deux nuits à Ολυμπία dans l’idee d’avoir une journée entière pour visiter le site archéologique et les musées associés. La pluie qui s’abat ce jour là nous pousse à visiter le musée en premier pour ne pas avoir à le faire une fois trempés. Nous retrouvons donc des éléments dont on commence à reconnaître les périodes : statuettes néolithiques, céramiques géométriques, sculptures classiques, etc. S’y trouve également une impressionnante statue de victoire, cet espèce d’ange féminin ailé dans une position qui représente le mouvement vers l’avant. Il y a également une statue d’Hermès portant l’enfant Dionysos en marbre poli dans un excellent état. Les grandes dimensions des frontons du temple de Zeus laissent imaginer la taille de la bâtisse que nous verrons sur le site (sous la pluie donc ...). Sont aussi exposés quelques moules en terre servant à former les morceaux en verre de la toge d’une statue. C’est comme cela que l’on se rend compte du niveau d’ornement que les statues pouvaient avoir à l’époque. Elles étaient bien loin de leur aspect actuel en marbre blanc nu. Elles étaient peintes, avaient des incrustations de bronze, cuir ou autre et donc également des décorations en verre. La partie à ciel ouvert est recouverte d’eau et la pluie n’a pas cessé... Les temples, le gymnase, le stade et les différentes administrations n’en sont pas moins impressionnants. Le site n’est pas énormément étendu mais les bâtiments en eux-mêmes sont vraiment imposants. La principale cause de destruction de la cité a été un tremblement de terre. Puis quelques pillages ont fini le travail. Vu la taille des colonnes du temple de Zeus couchées au sol, on veut bien croire que seul un séisme est capable de détruire une bâtisse si immense. Avant de rentrer à l’appartement pour sécher un peu, on fait un tour par le musée des jeux olympiques antiques. Les différents sports pratiqués et leur date d’apparition sont expliqués.




Avant de quitter le Πελοπόννησο, nous passons par le château de Χλεμούτσι (Chlémoutsi) également construit lors de la présence franque. Non loin de là, on fait une petite étape au bord d’une lagune boisée de pins d’Alep. Une multitude d’oiseaux se reposent là et l’ambiance est quelque peu perturbée par les travaux du village voisin. Nous arrivons dans l’après-midi à Ναύπακτος (Neupacte). Le village est situé sur le golfe de Κορίνθου. Son petit port protégé par les fortifications est mignon comme tout. Malgré la taille plutôt modeste du bourg, le nombre de bars et restaurants est assez important. Vu le charme de la ville, on le comprend facilement. C’est depuis le parvis de la forteresse qu’on profite le mieux du paysages. Bien que les bougainvilliers en fleur cerclant le petit balcon de notre chambre fournissent une belle concurrence ! Pour changer des plats grecs (et surtout par ce qu’on cherche une table à 20:30, quelle idée...), nous finissons la journée dans une crêperie peuplée d’adolescents en pré soirée.



Le site archéologique suivant est la ville de Δελφοί (Delphes). C’est aussi le dernier de la liste pour la Grèce. Non des moindres, on y trouve de magnifiques vestiges de temples et bâtisses offertes par les différentes cités. Ici, le temple majeur est celui d’Apollon. Mais l’intérêt principal du site est son emplacement. En hauteur, il domine une magnifique vallée boisée d’oliviers. Et plus loin, la mer bleue... Le stade creusé à flanc de falaise qu’il ne faut surtout pas manquer est malheureusement fermé au public. Qu’à cela ne tienne, il fait beau, nous dégottons un petit sentier qui devrait surplomber le site archéologique. Gagné ! Nous nous retrouvons juste au-dessus du stade avec une vue plongeante sur ce dernier. On ne regrette vraiment pas d’avoir remis au lendemain la visite du musée archéologique. Du belvédère, la vue à près de 360 degrés est magnifique. Le vent souffle tout de même et de gros nuages noirs sont en chemin pour nous rendre visite. De là-haut, on aperçoit un canal qui serpente dans la montagne. On l’avait croisé en voiture quelques heures auparavant lorsque nous montions. Son emplacement et sa taille nous intriguent. Qui l’a construit, quand et pour quelle utilisation ? Il nous faut creuser la question et peut y jeter un œil de plus près. Encore quelque chose à ajouter au programme du lendemain ! Le soir, on comprend rapidement que c’est jour de match de foot quand tous les restaurants sont vides jusqu’à 22h. La clientèle des quelques cafés ouverts est rivée aux écrans ! On se décide finalement pour une pizzeria même si dans quelques jours nous serons en Italie...



Lundi 28 janvier, programme chargé. Nous débutons la journée par un excellent petit déjeuner à l’hôtel après s’être fait réveiller par les premiers rayons de soleil de la vallée. Première étape de la journée, le musée archéologique. Plusieurs statues et bas reliefs sont en très bon état. On peut évoquer un beau taureau en bronze avec parties en or (dont les cornes et les testicules). La dernière salle expose un conducteur de char en bronze dans un état exceptionnel. À la sortie du musée nous contournons la montagne Παρνασσός (Parnasse). Cette dernière fut le lieu de culte de Dionysos et a inspiré le nom d’une butte puis d’un quartier de Paris (coucou klarimode). Nous faisons ensuite route pour le monastère d’Οσίου Λουκά (Hosios Loukas). De pur type byzantin, il renferme de magnifiques mosaïques et quelques sculptures remarquables. Un énorme arbre trône au milieu de la terrasse. Son ombre doit être bien agréable en été quand le soleil tape fort. Pendant la majorité de notre visite nous sommes les seuls touristes dans l’enceinte. On profite donc à fond de la sérénité du lieu avant de retourner à Δελφοί par la route côtière. Les lacets de cette dernière surplombent le golfe de Κορίνθου. Cela n’empêche pas les locaux de rouler à fond en doublant dans les virages. En fin d’après-midi, nous descendons ainsi le sentier qui mène à la mer pour aller voir le canal de plus près. Il fait quelques gouttes qui cessent rapidement, rien qui ne nous retienne sérieusement. La promenade est en majeure partie dans les oliveraies en étages. Comme dans une multitude de lieux que nous avons traversé, nous observons une grande quantité de ruches d’abeilles. Vu tous les plats à base de miel et celui qu’ils mangent simplement en tartine ou dans du yaourt, il faut bien loger les butineuses ! Quelle surprise, l’eau du canal s’écoule dans le sens opposé que nous imaginions ! À quelques centaines de mètres de l’endroit où le sentier arrive, un tunnel permet à l’eau de continuer sous la montagne. Pourtant, dans cette direction, la montagne s’élève de plus en plus haut. Il s’agit en fait d’un grand aqueduc qui relie un réservoir à la région d’Αθήνα. Il parcourt plusieurs centaines de kilomètres et traverse de nombreux tunnels. Sa construction date des années 70. En découvrant tout cela, on n’est pas déçus d’être descendus jusqu’ici.




Dernier test de conduite anarchique, la traversée d’Αθήνα pour aller rendre la voiture de location. Nous sommes heureux de rendre le bolide sans aucune égratignure malgré la multitude de dangers affrontés. Les scooters, arrêts en triples files, autobus qui débordent et taxis qui déboulent de partout n’auront pas eu raison ni de nous ni des rétroviseurs ! Nous profitons de la dernière journée et demie dans la capitale grecque pour apprécier encore un peu les ruelles aux pieds de l’acropole. On en profite aussi pour visiter deux musées ayant de belles expositions ainsi que le stade olympique. Ce dernier a été reconstruit en 1898 là où se trouvait celui de l’antiquité. Ses gradins sont en marbre et sa forme est fidèle à l’originale. La construction est belle et l’exposition de flambeaux et affiches bien sympa. Dans les musées, encore et toujours des statues de monsieurs (ou dieux, mais c’est presque pareil) tout nus ! L’un des soirs, dans un restaurant du quartier de Πλάκα, nous discutons avec un couple de lyonnais. Ils sont adorables et nous échangeons même la fin des pichets de vin pour goûter blanc et rosé ! Il nous reste quelques oranges à terminer sur les 10 kilos achetés en début de parcours. Elles sont tellement bonnes qu’il serait vraiment dommage de les jeter. On décide donc d’acheter un presse-agrumes pour en tirer le jus. Ça prendra moins de place et ce sera moins lourd à porter. On en obtiens tout juste un litre, la gourde est remplie !



Nous on aime bien les plannings rigoureux (!) alors comme lorsque nous quittions l’Amérique du Nord le 31 octobre, nous quittons la Grèce le 31 janvier. Le bateau nous attend à Πάτρα (Patras) pour atterrir à Bari en Italie le 1 février. Dans le bus pour se rendre au port, la lumière est spectaculaire entre les nombreuses averses. Nous longeons alors le golfe de Κορίνθου par la rive sud opposée à la route que nous avions pris auparavant. Au guichet pour échanger le billet électronique contre le ticket d’entrée sur le bateau, la dame est particulièrement indélicate. On gardera une image très contrasté de ce pays. Les habitants peuvent être souriants et très gentils comme désagréable au possible. Est-ce la crise qui en a rendu certains amers ? Est-ce l’euro ? Est-ce le fait qu’on ne parle pas leur langue ? Est-ce une mentalité naturellement fière et orgueilleuse peu tolérante vis à vis des touristes ? Ou est-ce simplement qu’on a des têtes qui ne leur reviennent pas ? Si vous avez visité ce beau pays avant les années 2000, nous serions vraiment intéressés par votre avis sur la question ! La météo humide aura bien modéré l’image d’une Grèce où l’on brule au soleil. Découvrir les sites archéologiques fut malgré tout une certaine source d’émotion en imaginant le raffinement d’un peuple qui a été capable d’élaborer tant de choses.


Dans le bateau, nous ressortons les duvets et tapis de sol. Personne ne vient nous embêter, on se réveille donc avec la côte italienne à l’horizon. Le ciel est dégagé, on espère que ce changement de pays est le moment où la météo devient plus clémente !