23/12/2018

Irkoutsk -> Moscou - Transsibérien 3/3 🚂

Nous sommes le mercredi 19 décembre, il est 16h39, le train démarre. Ce dernier bout de chemin est le plus long de tous pour nous. D’une seule traite, nous devons relier Иркутск (Irkoutsk) et Москва (Moscou). C’est ainsi que pour 88 heures et 32 minutes, nous emménageons dans le compartiment koupé (4 couchettes) du train numéro 69. Au total, nous passons 12h à l’arrêt dans les différentes gares où nous faisons escale. La distance à parcourir est d’environ 5200 kilomètres. La vitesse moyenne, lorsqu’on roule, est donc d’environ 68 km/h.


La provinidsa (cheffe du wagon) parle quelques mots d’anglais, elle est très souriante, c’est sympa. Son service est un aller-retour entier entre Чита (Tchita) et Москва. Soit 8 jours d’affilée. La nuit vient de tomber quand le train démarre. Une dame de la cinquantaine est déjà installée dans le compartiment. On échange difficilement mais elle est très simple. Par exemple, lorsqu’elle souhaite se changer, et demande à Médy de sortir quelques instants. Ce dernier dit « да да » mais ne bouge pas ... La dame rigole nerveusement puis répète sa requête. Jusqu’à ce qu’Estelle comprène et ne vire Médy. Elle se rend à Красноярск (Krasnoïarsk) pour se faire opérer des yeux. Elle est toute bien habillée. Mis à part cette dame, nous avons peu de compagnons de wagon. Deux hommes nous rejoignent le deuxième soir vers Новосибирск (Novossibirsk). Le premier nous quittera le matin suivant et le second le soir suivant. Aucun des deux ne nous adressera la parole du trajet ...



Le wagon restaurant devient notre deuxième maison dans ce train. On y prend nos habitudes et on y croise souvent les mêmes personnes alcoolisées. Le plus notable est ce monsieur qui veut absolument nous parler en russe. Il rigole bien à chaque fois qu’on lui dit qu’on ne comprend rien. Les serveuses sont un peu agacées mais finissent par lui offrir des verres à lui et ses copains. Ils n’ont pas l’air bien méchant ! À chaque fois que nous traversons le train en chaussons pour rejoindre le resto, les paliers sont gelés. Non chauffés et exposés au vent, la neige s’y accumule et le sol est glissant. Une odeur de métal froid s’y respire... comme si on était dans un congélateur..



Au premier matin, le temps est couvert. La neige tombe dehors. À moins que ce ne soit celle qui s’envole sur notre passage. Le soleil ne monte pas bien haut dans le ciel et la forêt reste sombre. Il y a peu de relief et les forêts sont principalement faites de bouleaux et conifères. Le ciel ne se découvre qu’en fin de journée, quand le soleil se rapproche de l'horizon. C’est à dire vers 14h ... La visibilité dépasse enfin les 50 mètres et surprise, il y a des arbres, lacs, plaines à perte de vue. Le soleil se couche bientôt et le train vire au sud pour nous permettre de l’apprécier pleinement. Oui notre cabine est sur la gauche du train, donc la plupart du temps faisant face au sud. Le deuxième jour est plus dégagé. On profite du lever de soleil sur des étendues de neige immaculée. Les arbres ne sont plus les mêmes. Bien sûr, les sapins et bouleaux sont toujours là. Mais de nouvelles essences se sont ajoutées. Les forêts sont plus variées en allant vers l’ouest et en quittant peu à peu la Sibérie. Le troisième jours est dégagé également. On arrive à apercevoir les cheminées qui fument à plusieurs centaines de mètres. Chaque jour, nous reculons deux fois d’une heure. La première en début de matinée et la seconde en fin de matinée.





Plus nous avançons, plus la température est clémente. Si bien qu’on peut presque s’aventurer dehors sans double couche ! Mais dans les gares les plus orientales du périple, pas question de se découvrir. Ce n’est pourtant pas la température glaciale qui gêne les fumeurs : ils sortent généralement pieds nus dans les claquettes. Certains sont même en short pour enchaîner les cigarettes. Pour nous, à chaque arrêt d’au moins un quart d’heure, c’est le rituel de l’enfilage des couches. Le wagon étant autour des 23 degrés, il faut s’équiper pour le choc de température ! Malgré la difficulté à s’extirper de la chaleur, cela fait du bien de sortir se dégourdir les jambes. On peut ainsi observer les provinidsa ou agents de maintenance casser la glace accumulée sur les bogies. Dans certaines gares, les arrêts vont jusqu’à 1h30. On se rend compte que c’est généralement l’occasion de changer la locomotive. Nous n’avons pas réussi à savoir pour quelle raison exactement ... Pour nous, cette pause la plus longue est l’occasion de découvrir la ville de Екатеринбург (Ekaterinbourg). On fait donc un petit tour en métro et une promenade dans le centre-ville. C’est finalement assez court pour découvrir une ville ! Heureusement qu’on a prévu plusieurs jours à Москва et Санкт-Петербург (Saint-Petersbourg) !





17/12/2018

Deux semaines en Sibérie 🇷🇺

C’est le dimanche 2 décembre que nous foulons le sol sibérien. En gare d’Иркутск (Irkoutsk) l’air est rafraîchi par le vent glacial. La température affichée n’est pas si faible, juste -18 degrés. Mais en ressenti, on avoisine les -30 degrés. Plus tard dans la soirée, cela descendra à -40 degrés de température ressentie. Et là, on ne traîne pas dehors. En prévision des excursions dans la nature, nous nous équipons de semelles isotherme pour protéger nos orteils. L’auberge où nous avons réservé deux nuits est en plein centre-ville. Il faut prendre le tramway à l’ancienne 🚃 pour s’y rendre. On remarque l’arrêt car il y a un regroupement de personnes dans la rue. Mais à part ça, rien qui matérialise l’endroit. On attend quelques minutes douteux de l’endroit. Puis les crissements précédent le véhicule qui s’arrête bien à l’endroit espéré. Une fois montés avec nos gros sacs, une dame fait le tour des nouveaux clients. Elle nous tourne le dos et ne viendra jamais nous demander d’argent. Premiers pas en Russie et on fraude déjà... Il va falloir rentrer dans les règles si on ne veut pas se faire expulser !


Une fois les affaires déposées dans la chambre, un repos s’impose. Le train, bien que couchette, n’est jamais d’un grand repos. Les passagers circulent, la machine s’arrête, des employés discutent d’un bout à l’autre du wagon et puis nos voisins sortent à chaque pause pour revenir en sentant la cigarette... La nuit tombe rapidement, vers 17h. A peine la sieste terminée qu’il est temps d’aller manger. Nous passons le jour suivant à nous promener dans les rues de la ville. Le froid est saisissant. C’est une ville très agréable que nous découvrons. La rivière Ангара (Angara) fume et la neige tapisse le seuil des églises orthodoxes que nous visitons. L’intérieur de ces dernières présente les figures du christianisme avec une abondance de dorures, comme dans les temples bouddhistes. La ville regorge de maisons en bois. Beaucoup sont très joliment ornées autour des ouvertures. Certaines penchent fortement. Les premières découvertes culinaires sont plus que concluantes. Les борщ (borch, soupe de légumes et viande), гуляш (goulasch, bœuf émincé et sauté avec des légumes) et шашлык (chachliks, brochettes) sont excellentes.




Nous reviendrons trois fois à Иркутск par la suite. Histoire d’avoir le temps de bien découvrir cette capitale de la Sibérie et de faire des étapes entre les différents endroits visités. Mais pour le moment, nous partons pour le lac Байкал (Baïkal) et son île principale, Олькон (Olkhon). Le bus passe à côté de notre auberge le matin et la route dure la journée entière. Une fois sorti de la ville, il traverse des collines enneigées. Ce n’est qu’après la pause déjeuner (à midi tapante) que nous entrons dans la forêt. Il faut gratter régulièrement pour y voir quelque chose au travers des vitres. Le chauffage souffle à fond, les vitres se recouvrent de buée qui se transforme rapidement en givre coriace. Le relief se fait de plus en plus variable à l’approche des rives du lac. Le chauffeur fonce tête dans le volant. Les pentes à 12% ne lui font pas peur, même entièrement verglacées, même avec un vent latéral puissant ! Nous arrivons en fin d’après-midi à l’embarcadère. Le lac est recouvert d’une épaisse couche de glace que nos pierres jetées très haut n’arrivent pas à percer. Quand le bateau arrive (ou plutôt, le brise-glace), il manœuvre plusieurs fois pour ouvrir la glace suffisamment et que nous soyons capables de repartir. Pendant la demie heure de traversée, Médy discute avec un toulousain venant rendre service à l’abbé de l’île. Il vit en Thaïlande et a donc vécu un saut de quasiment -60 degrés entre les deux pays. Dès que nous atterrissons, le bus repart à fond sur les pistes en terre.



Les quatre nuits sur l’île, nous dormons chez Нина (Nina). Elle doit avoir dans les 75 ans et reste en pleine forme. Son fils vit avec elle mais on ne le voit pas du séjour. Il est à Иркутск et elle gère donc seule la maison. Sur l’île, il n’y a pas l’eau courante. On a donc une bassine d’eau claire à disposition dans la cabane. On remplît à la louche un réservoir au dessus de l’évier en fonction du besoin et l’eau usée est récupérée dans un seau juste en dessous. Pas de tuyau ou mitigeur, là on palpe bien ce qu’on consomme réellement. Le chauffage est assuré par un beau poêle de masse. Carré et recouvert d’un enduit blanc, tout comme celui d’Aurore la sœur de notre copine Amandine ! Нина nous montre comment s’en servir pour cuisiner dessus. Parfait pour la cuisson des spaghettis à la sauce tomate ! Le lambris qui recouvre murs et plafond donne des airs de chalet de Castres à notre cabane.



À nos premiers pas dehors, le matin, on sent bien le climat sibérien. Le fond de l’air est frais et le vent glacial est puissant. Comme régulièrement au cours de notre séjour en Sibérie, nous sommes rapidement rejoints par un chien. Il profite de notre compagnie pour sortir se promener. Et occasionnellement, réaffirmer son territoire. Nous sommes donc seulement trois sur le site du rocher du chaman. Cette presqu’île rocheuse est le centre spirituel du chamanisme de la région. C’est vrai que quelque chose de mystique s’en dégage. Les embruns du lac se déposent sur les paroies rocheuses ajoutant à l’atmosphère glaciale. On se croirait dans Game of Thrones au delà du mur. Sur le lac, les vagues portent des marmites de glace jusqu’à geler à leur tour et former des dunes de glace. Chaque photo nécessite d’enlever les gants. Et les mains toutes nues, ça prend très vite froid ! On met donc environ 30 secondes pour prendre une photo. Après quoi, il faut bien 5 minutes pour réchauffer les doigts. De toute façon, si on fait le paparazzi, c’est la batterie du téléphone qui prend froid et il s’éteint.





Sur l’île, les seuls endroits pour manger sont des cafés. Ce sont en fait des brasseries simples où l’on sert donc de la nourriture en plus des boissons. À la différence des restaurants, il n’est pas nécessaire d’y être bien habillé. C’est donc dans le кофе центр (café du centre) qu’on se pose pour se réchauffer un peu. Pour le reste de l’après-midi, on retourne se promener dans les environs du rocher du chaman. Le vent s’est intensifié (oui en fait c’est possible...), cela devient presque difficile d’avancer en plus de respirer. Le froid ça fatigue, et c’est crevés que nous rentrons nous reposer au chalet. Les prochaines fois, Médy devra porter les lentilles. Les lunettes, quand on essaye de protéger son visage du vent, ça prend la buée. Et la buée, comme sur les vitres du bus, ça gèle vite quand la température est inférieure à -30 degrés !


Jeudi matin, nous avons rendez-vous avec Саша (Sacha) pour visiter le nord de l’île. C’est un joyeux bouriate qui ne parle pas anglais mais la communication non verbale se passe bien. Il pilote une belle Lada 4x4 et gère les dérapages sur la glace à la perfection. La pop russe vrombi des haut-parleurs quand on slalome entre les arbres. Il fait encore plus glacial que la veille. Heureusement qu’on a la voiture pour se réchauffer entre chaque sortie dans le froid. Les paysages sont surnaturels. À nouveau la glace recouvre les falaises qui se font de plus en plus hautes en approchant de la pointe nord. Non loin de cette pointe se trouve le point le plus profond du lac à 1600 mètres de profondeur. Le vendredi, il nous emmène au sud avec en prime deux arrêts pour patiner sur des parties gelées du lac ! Après une étape sur un point de vue panoramique, on se dirige vers la lagune gelée. Une structure métallique nous attend au milieu de la glace pour chausser les patins. Après quelques glissades, la Lada reprend de l’adhérence et nous emmène au vestiaire de fortune. Depuis les hauteurs, la glace ne semblait pas vraiment étendue. Mais une fois dessus, c’est immense. La sensation est géniale. Par endroits, la glace est pure sur plusieurs dizaines de mètres carré. Les fissures sont les seuls indice pour savoir à peu près l’épaisseur de glace qui nous sépare des profondeurs. Par moment, la glace pousse des cris comme des claquements de corde quand des fissures se propagent. La deuxième patinoire est un fjord où le vent souffle fortement. Tellement que Саша doit mettre la voiture à l’abris quand elle commence à se faire pousser. Après un passage sur une falaise de la côte ouest, il est temps de rentrer se mettre au chaud.






Samedi, nous quittons notre île sauvage. Passage obligatoire à Иркутск pour revenir sur les rives du Байкал le dimanche, à Листвянка (Listvyanka). Dès le lundi matin, nous organisons les jours à venir en fonction de nos envies et des propositions de notre hôte. En 3 jours, nous avons le temps de visiter le russophone musée du lac, de tester notre premier bain russe privé, de parcourir une dizaine de kilomètres sur le chemin de grande randonnée autour du Байкал, d’explorer les raccourcis dans la forêt scintillante, de longer le lac sur la route principale de nuit, au coucher de soleil, sous la brume et sous le soleil ! Il fait bien meilleur que sur Олькон, on apprécie de pouvoir rester plusieurs heures dehors sans congeler. L’expérience la plus folle, c’est le chien de traîneau : installés sur une luge améliorée, nous avons traversé la forêts et les rivières glacées à la vitesse des chiens de compétitions et de leur maîtres expérimentés. Passé la déception de n’avoir « ridé » qu’une heure sur les trois que nous pensions avoir payé, nous nous sommes faits à l’idée que le temps de préparation des chiens et les temps de pauses améliorées faisaient partie du deal ... On est heureux de pouvoir rester plus longtemps que la plupart des personnes croisées à l’auberge. Il y a tellement de beaux endroits partout, qu’on arrive à être frustrés de ne pas avoir prévu plus de temps... Mais c’est l’heure de rentrer sur Иркутск pour le bus du lendemain direction Аршан !




Nous sommes un peu déstabilisés quand on demande notre billet au guichet pour ce bus. La première guichetière nous dit « niet » « tomorrow » alors qu’on s’était renseigné la veille auprès de la réception de l’auberge pour connaître les horaires. La deuxième nous indique quand même la gare ferroviaire pour trouver un autre bus. Heureusement le tramway nous fait traverser rapidement de l’autre côté de la ville. Médy n’avait pas trop envie de faire du stop, et Estelle est aussi soulagée quand le minibus nous embarque. L’arrivée à Аршан au coucher de soleil est très sympathique. Une fois arrivés devant la chambre d’hôtes au milieu des bois, impossible d’entrer. Au téléphone, la personne ne parle que Russe et nous n’arrivons pas à lui faire comprendre qu’on est arrivés. C’est une dame qui promène son petit fils en luge qui nous aide en expliquant la situation au téléphone. Une fois entrés, nous devinons que notre hôte s’excuse de nous avoir laissés dehors. Elle nous présente les différentes maisons en bois : grande cuisine, sauna à réserver, douche et toilettes à côté de notre chambre, lumières de Noël, c’est top ! On est heureux d’y poser nos sacs à dos pour 4 nuits. Ce petit coin de paradis nous permet de bien nous reposer entre les balades dans les montagnes et au bord de la rivière sacrée. Nous croisons de nombreux petits oiseaux, et presque à chaque fois, un chien nous accompagne pour la promenade. Même s’ils ne se montreront pas, on devine qu’il y a des loups, des rennes, des lapins,... grâce aux traces bien nettes dans la neige. Comme il fait moins froid que les jours précédents, la glace est moins solide. On se fait bien peur en essayant de marcher dans les traces d’une voiture au dessus de la rivière : la glace casse sous les pieds d’Estelle dans un bruit surprenant. Demi-tour de suite ! Après plusieurs passages dans les zones sacrées d’Archan : rivière qui guérit, temple bouddhique, stupas, autel de la déesse de la médecine,... Estelle pense au long morceau de tissu Liberty accroché à son sac. Il finit autour d’un arbre en haut d’une falaise sur la route du « love pic » en pensée pour Charlotte et Rémi :) Nous testons aussi de sortir en serviette sur la terrasse du sauna... On rigole bien à la fumée que l’on dégage !





Lundi, c’est le moment de retourner à Иркутск. Le bus n’étant toujours pas à l’heure que nous croyions, on traine dans le parc du complexe thermal puis dans notre café préféré avec wifi. Il nous reste un jour à Иркутск avant de reprendre le transsibérien ! Ces 2 semaines en Sibérie seront passées très vite ! :) Malgré tout, nous avons eu le temps de nous perfectionner dans quelques domaines. Après la Mongolie, on savait estimer les températures négatives en dizaines. Maintenant, on est à peu près capables de trouver la bonne valeur à cinq degrés près ! Les trottoirs glissants n’ont plus de secrets pour nous. On sait maintenant se laisser glisser car on retrouvera bien de l’adhérence à un moment ... Estelle apprend la patience comme une vraie russe. C’est difficile pour elle mais elle ronchonne de moins en moins quand les plats arrivent lentement au resto, quand le bus prévu n’est pas là ou quand le bonhomme est rouge et qu’il n’y a aucune voiture. Médy prend un peu la confiance pour parler russe. Il reconnaît quelques chiffres et certains mots clés. Par contre, il nous faut encore un peu de pratique pour l’estimation de la solidité des rivières gelées. Surtout lorsqu’on porte des crampons aux pointes coupantes ...



10/12/2018

4 mois de voyage 📌

Il serait peut-être temps de regarder en arrière pour jauger nos aventures sur les 4 mois écoulés. Déjà, vous remarquerez qu’on a sauté un mois... Ensuite, on ne compte plus les kilomètres à pieds, en voiture ou en train. On ne compte plus l’argent non-plus, enfin pas d’une manière digne d’un compte-rendu ordonné... En fait, on profite à fond de notre temps et c’est pas si mal !

Sur les 4 mois passés, nous avons changé 10 fois de pays (dont 5 fois en Amérique du Nord qui ne comptent pas vraiment). À chaque fois, un petit quelque chose se passe dans notre cœur. Ok, pour le passage France-Islande il n’y a quasiment que de l’excitation... Mais les fois suivantes, on a l’impression que les vacances sont finies. Qu’on ne pourra pas à nouveau avoir autant de plaisir ailleurs. C’est là que le ventre se noue... Puis on débarque ailleurs après plus ou moins d’heures de vol ou train. Le premier changement est généralement le climat. Il faut donc s’y adapter. Et ça se fait bien car pour le moment notre équipement s’est révélé suffisamment adapté. Quasi systématiquement, on commence par une journée à pieds pour prendre nos marques. Puis d’heure en heure, de jour en jour, on rencontre des gens adorables et on découvre des lieux nouveaux. Au fur et à mesure, on se rend compte de notre chance d’être là où nous sommes. Tous les jours nous apprécions nos aventures et on kiffe...

D’accord, ça fait un peu bizarre à Estelle d’être loin des gens qu’elle aime. Rater les naissances, anniversaires et départs en retraite... Ce n’est peut-être qu’une question de Champagne en fait...

Le bilan des 4 mois est donc : tout va bien ! On vous embrasse bien fort !


06/12/2018

Nos apprentissages en Amérique du Nord 🇺🇸🇨🇦

Visas

Ça ne sert à rien de gagner 7$ en ne faisant pas le pseudo visa canadien ETA (théoriquement inutile car on arrivait au Canada en voiture depuis les USA). Surtout pour deux raisons qui nous concernent : on a fait une escale à Vancouver entre Seattle et Beijing et l’ETA est obligatoire dans ce cas, l’ambassade de Chine a peut être pris du temps car notre situation au Canada sortait de leur cadre habituel.

Saluer

Il y a mille façons de se saluer. Leurs préférées sont quand même en demandant si ça va bien. Et pour ça, des fois il faut avoir l’oreille pour comprendre le « ow ya doune ». Si le situation le permet il faut répondre que ça va bien, merci et vous ? Perso je ne prenais pas la peine de cette politesse quand on se croise furtivement sur un sentier de randonnée. Mais eux le font, ils ont toujours quelque chose à dire ! La vue est belle de là-haut, ça vaut le coup, il y a trois cerfs à 5 minutes, les pauses me font du bien, etc.

En voiture

Sur la route on prend facilement goût au fait de pouvoir doubler à gauche ou à droite au choix. C’est pratique de pouvoir rester sur la voie du milieu sans trop se soucier des autres. Ceci n’est possible que lorsque la route comprend 3 voies minimum. Sinon il faut rester à droite !

En fonction des endroits, les vitesses limites se dépassent de 5 à 20 miles par heure assez aisément. Parfois, les vitesses conseillées pour les virages sont identiques aux limites en ligne droite. C’est bien que personne ne les respecte ! Dans l’ensemble, ils roulent super vite. On se dit que les policiers doivent avoir des choses plus graves à surveiller. Ce qui d’une n’est pas nécessairement bon signe et de deux fait bien peur ! Plusieurs fois, nous nous sommes fait doubler par des voitures allant à fond en pleine montagne. Et deux fois, nous avons vu ces mêmes voitures encastrées dans un pan de falaise quelques miles plus loin.

Ce n’est pas aussi flagrant dans tous les états/provinces mais de manière générale, on ne s’arrête pas vraiment aux stops. On doit plutôt les « glisser » et ça devient perturbant quand il y a un stop à chaque route du carrefour. Ça se passe dans l’ordre d’arrivée et parfois c’est pas évident ! Encore moins quand ils grillent le feu (vu à Las Vegas). Et on ne parle pas de la possibilité quasi systématiquement de tourner à droite quand le feu est rouge.

Pourboires

Les pourboires sont quasi obligatoires dans plusieurs domaines de service. On a posé la question plusieurs fois histoire de ne pas commettre d’impair. Donc dans les stations essence c’est plutôt rare d’avoir à en donner si quelqu’un fait le plein à notre place car il est payé correctement. D’ailleurs, si on ne veut pas se faire servir, en général, il faut éviter la pompe numéro 1 ! Si on le souhaite quand même, on peut laisser le change si on paye en cash ou 1 ou 2 dollars.

Dans les fast-food ce n’est pas nécessaire mais on peut aussi si on le souhaite. Il y a plutôt des boites pour les fondations propres au restaurant. Là aussi, en général c’est pour le change ou 1 ou 2 dollars.

Dans les restaurants classiques c’est obligatoire par contre. Quand on paye par carte bleue, c’est géré différemment entre les USA et le Canada. Aux États-Unis, on complète le ticket de caisse au stylo avec le montant du pourboire à laisser et la signature. Cela se fait juste après avoir laissé sa carte de paiement dont ils prennent l’empreinte magnétique du montant de base puis ajoutent le pourboire ultérieurement. Au Canada, on choisi le montant ou pourcentage du pourboire directement sur le terminal avant de valider le paiement avec le code PIN ou la signature numérique.

Pour les autres services comme le coiffeur on ne sais pas trop ce qui est la convention donc on en a laissé à chaque fois. Au moins pour les restaurants, si on est satisfait, la valeur du pourboire devrait être supérieure à 20%.

Pour boire

Quand on boit de l’eau, cela peut être frustrant de ne pas pouvoir se servir aux robinets n’importe où. Il faut se méfier de la qualité de l’eau courante parfois non propre à la consommation. Il est possible néanmoins de remplir ses bidons à des fontaines disponibles dans quasiment tous les campings gérés par les états ou au niveau national. Il y a également des fontaines dans tous les offices de tourisme. Nous avions donc deux bidons de 4 L et un de 2 L pour avoir suffisamment de réserves. Ça nous a suffit et c’était bien pratique !

Campings

Les parcs nationaux et d’état/provinciaux sont de grandes zones de loisir. Les campings sont simples mais se trouvent dans des endroits magnifiques et ils sont très spacieux. Cela explique sûrement pourquoi ils sont très prisés. Dans des régions au climat le permettant, la haute saison continue jusqu’en novembre. Il peut donc être très difficile de trouver des emplacements libres, mêmes quelques semaines en avance. On nous a ainsi précisé qu’en général, il faut s’y prendre au moins un mois avant. Il y a quelques emplacements (parfois l’intégralité) qui sont gérés en premier arrivé/premier servi ce qui peut être pratique à condition d’arriver tôt dans la journée (avant 15h dans tous les cas). Ce n’était pas vraiment notre cas donc pour nous c’était au petit bonheur la chance. En périphérie des parcs nationaux, il y a aussi les BLM (Bureau of Land Management) qui sont des campings rustiques généralement moins bondés que ceux des parcs.

Dans tous les cas, la réservation d’un emplacement est vraiment compliquée. Tout du moins avec les versions pour mobile des sites web. La recherche d’un emplacement sans connaître le nom du camping est très laborieuse (le nom du parc aurait pu suffire mais non !). Il faut aussi compter sur le fait que les parcs sont généralement des embriquements de parcs nationaux, de forêts nationales, de prairies nationales, de zones de loisir d’état et de parcs d’état. Soit une gestion différente des campings et de leur réservation. Quand finalement on trouve ZE emplacement libre que l’on souhaite ... il faut se créer un compte avec pléthore d’informations dont le code postal ou numéro de téléphone aux formats américain (!) ou alors l’emplacement n’était en fait pas libre du tout... Au final, nous n’avons réussi à réserver qu’un seul emplacement, au Yosemite. C’était le dernier de disponible, il était super calé et on a été ravis de l’avoir car sinon tout est extrêmement excentré.

À deux au restaurant

Il n’est pas rare de voire des couples (amoureux/amis/collègues) partager le même plat au restaurant. C’est même la norme en fait. Que ce soit une pizza ou une salade, on prend généralement la taille moyenne pour deux personnes. Et en plus il devrait même en rester pour le lendemain. Et évidement, on nous a toujours accepté d’emporter ce qu’on n’a pas mangé dans un « doggy bag ».

Se faire une beauté

Si vous prévoyez de vous faire faire couper les cheveux à l’étranger, plusieurs possibilités. Soit vous gérez parfaitement la langue pour décrire ce que vous voulez. Ce n’est pas notre cas ! Sinon, encore deux possibilités. La première est de laisser faire le coiffeur en adaptant votre coupe au style local. La seconde, c’est de se prendre en photo au bon moment avant de partir. De cette façon, ça devient bien plus simple d’expliquer ce que l’on veut !

Ulaanbaatar -> Irkoutsk - Transsibérien 2/3 🚂

Samedi 1er décembre, jour de depart, quelques provisions s’imposent. Batterie de secours, snacks, soupes instantanées, baume à lèvres, thé ... et des bières. C’était sans compter sur notre caissière appliquée qui nous a mis les 4 bières sous son comptoir. Il est plus de midi, est-ce que c’est parce qu’on fait trop jeunes ? Derrière nous une dame apparement mongole et d’un certains âge. Sa bouteille de vin subit le même sort que nos bières. Après une recherche internet on découvre que la vente d’alcool est interdite le premier jours du mois en Mongolie. Que dans certaines provinces c’est même interdit un jour par semaine ! Sans le savoir, Médy aura fait de la contrebande en achetant 4 canettes à un autre endroit ! La vendeuse lui a précisé de les cacher sous son manteau quand même !

C’est une jeune fille de notre auberge qui nous appelle un taxi en tendant la main, au niveau des hanches, pas en l’air comme nous. On ne voulait pas être en retard... On arrive 2 heures avant le départ du train ! Dans la salle d’attente du transmongolien, un groupe de filles russes discute, leur langue est belle ! Médy fait le tour de la gare, change les billets de 20 000 Tugrik contre des roubles, etc. Le train ouvre ses portes 40 minutes avant le départ, comme nous avait dit notre bienveillante Отгоо !


On installe nos gros sacs sous les banquettes, et nos affaires pour le trajet dans les placards. On est prêts pour 23h de train ! À l’entrée de notre wagon, nous sommes accueillis par une belle hôtesse russe. Son rouge à lèvres est aux couleurs de la compagnie de trains. Les voitures sont plus modernes que celles que nous avions eu jusqu’ici sur le transsibérien. Les compartiments sont également plus confortables. C’est par ce que cette fois-ci, nous serons en couchette molle ... On s’embourgeoise ! Toujours est-il que les vitres ont l’air d’être en véritable double vitrage. Peu d’air semble s’infiltrer, ce qui n’est pas si mal pour se rendre en Sibérie.

Un étudiant en alternance mongol nous rejoint. Ses copains sont dans la cabine d’à côté. Pendant tout le voyage, il fait des allers retours entre nous et ses copains, passant plus de temps avec ses eux mais nous proposant de la viande de cheval séchée, des patates et du milk-tea préparé par une dame mongole. Il nous indique aussi la dernière ville mongole, nous prévient de l’arrivée à Irkoutsk où il fait plus froid qu’en Mongolie. Il nous emprunte notre jeu de carte et ronfle comme un chinois :) Il répond aussi à la contrôleuse mongole que nous sommes des touristes :) Il fait des blagues à l’hôtesse du wagon et tous ses copains rigolent bien.

Отгоо nous avait prévenu, pas de wagon restaurant pour ce train là. Le repas du soir sera fait des restes de poulet du pic-nic à cheval. Réchauffé sur le radiateur c’est nickel. Quelque pipas et pistaches puis des pommes en dessert et le tour est joué avant de se coucher. Le lendemain midi, soupes instantanées quelques heures avant de débarquer.


À la frontière entre Mongolie 🇲🇳 et Russie 🇷🇺, le défilé des agents de douane et d’immigration commence. D’abord sur le territoire mongole pendant 1h20 puis côté russe pour 1h50. Comme entre la Chine 🇨🇳 et la Mongolie 🇲🇳, le passage de la frontière s’effectue autour de minuit. De telle sorte que le tampon de sortie du territoire est toujours à une date différente que l’entrée sur le territoire suivant. L’hôtesse du wagon aide les contrôleurs en portant les passeports lors de la tournée d’inspection. Pour le côté mongole, on est pris au dépourvu pour le contrôle d’identité. Il faut se lever et retirer les lunettes. C’est donc en caleçon que Médy se met debout avec pour effet la surprise de l’hôtesse. Ok ... côté russe on est prêts, Médy a son pantalon sur lui ! Un chien fait le tour pour sniffer toute substance illicite. Puis en dernier, un douanier acrobate qui grimpe sur les lits en hauteur et termine par une galipette.

Quand nous nous réveillons, le soleil commence à se lever. Le paysage a bien changé pendant la nuit. Les vallées sont beaucoup plus encaissées. Les forêts sont plus hautes et plus denses. La neige est également bien plus présente. La couche au sol semble plus épaisse et constamment en augmentation. Les habitations sont maintenant faites de bois et de tôle. Plus une seule yourte en vue. Quand nous croisons des villages, des enfants se font traîner sur des luges. Ils sont accompagnés de chiens crachant une épaisse fumée à chaque respiration. Au bout d’une heure nous commençons à apercevoir le lac Байкал (Baïkal). Lorsque nous sommes sur ses rives, on discerne à peine les montagnes de l’autre rive. De la fumée flotte au dessus des vagues dignes d’une mer intérieure. Plus nous avançons plus le relief est abrupt. Parfois, on se retrouve presque à flanc de falaise. On voit maintenant parfaitement la rive opposée. Ses montagnes se jetant dans le lac sont éclairées par la lumière d’un soleil caché pour nous. La neige tombe de plus en plus intensément jusqu’après la ville de Слюдянка (Slioudianka) où nous quittons le lac. À ce moment, le train commence à grimper dans la montagne. Les paysages sont superbes. On surplombe des ravins dont on ne voit pas le fond. La forêt est toute autour de nous.




C’est vers 14h30 que notre train s’arrête en gare d’Иркутск où nous descendons pour deux semaines. Pas de chauffeur pour nous attendre, nous prenons le tramway. Direction l’auberge de jeunesse pour aller se reposer un peu. Les ballottements du train et le vent froid nous ont bien fatigué malgré le peu d’exercice effectué ...


02/12/2018

Deuxième semaine en Mongolie 🇲🇳

Comme présenté auparavant, nous avons fait appel à deux agences locales pour découvrir la Mongolie. La seconde, Tsolmon travel, avait fait preuve de plus de souplesse quand nous demandions d’ajouter des jours de temps en temps pour profiter pleinement. C’est donc cette dernière que nous avons retenu pour nous emmener sur la durée la plus longue. Et nous n’avons pas été déçus !


Entre les deux séjours organisés, on passe une petite journée dans la capitale. Nous visitons ainsi un temple entouré de buildings et le musée des dinosaures. Le premier nous permet de se rendre compte du taux d’humidité de l’air à 20%. Le second présente des fossiles découverts en Mongolie. C’est le pays présentant la plus grande quantité de fossiles au monde après les USA ! La pièce maîtresse est un Tyrannosaure-Bataar cousin du Rex américain. Nous gardons le musée du puzzle et de l’intelligence pour le dernier passage à UB.


Nous sommes récupérés au petit matin par une nouvelle équipe. Cette fois-ci, pas de train et de 4x4 japonais. Nous circulerons dans un van russe flambant neuf. L’intérieur est rustique et très confortable. Les bouchons de la capitale nous permettent de faire de plus amples connaissances avec la guide Отгоо (Otgoo) et le chauffeur Хурлее (Hourtlee). Après la traversée de pleines et montagnes, c’est Сараа (Sarah) qui nous accueille dans la yourte familiale. En été, elle gère le restaurant du camp de yourtes, avec tables et chaises à l’occidentale. Nous sommes les deux seuls touristes dans le coin, alors nous mangerons chez elle. Même s’ils ne sont plus nomades, elle et son mari vivent de la même manière. Les moutons et les chèvres sont déplacés de pâture en pâture tous les jours. La cuisine se fait dans le foyer de la yourte dont la combustion est maintenue avec du bois, du charbon et des crottes sèches. Quand nous entrons timidement dans la demeure, Сараа termine la préparation des buzz. On est tout de suite déchargés de nos manteaux sur l’un des deux lits puis installés sur de petits tabourets. Notre place est à gauche en entrant dans la yourte, là où sont assis les invités. Hormis le poêle et la table à manger, tous les élément se trouvent en périphérie. Dans le sens des aiguilles d’une montre à partir de la porte d’entrée, on trouve : la pochette suspendue avec les affaires de toilette, un meuble de rangement, un lit en métal, des batteries de voitures branchées à des panneaux solaires alimentant une télévision et d’autres appareils électroniques, des photos de famille et un hôtel garnis de quelques offrandes, le second lit, un meuble vaisselier puis finalement la poubelle proche de la porte. Le “milk-tea” nous est servi en même temps que la proposition de bonbons. On n’est pas encore à l’aise mais les sourires sont bienveillants. Notre guide traduit et accompagne d’explications les gestes rituels. Pendant que nous mangeons la soupe, ce sont les buzz qui cuisent à l’étouffée. Ces sortes de ravioles doivent être dégustées dans un ordre bien précis. L’objectif étant de ne pas se brûler. D’abord, les attraper par le haut, croquer le bas pour faire une petite ouverture, souffler dans le trou, avaler le jus puis gober le tout. La garniture est faite de viande de mouton mélangée à quelques légumes. C’est super bon ! Nos hôtes attendent que nous ayons fini pour se mettre à table à leur tour.



Comme nous avons deux nuits à cet endroit, nous passons le reste de l’après-midi à nous promener dans la montagne environnante. La vue sur les dunes de sable voisines est splendide. Il semble que des cerfs soient dans la région mais nous ne les rencontrons pas. Tant pis, il faut redescendre avant que la nuit ne tombe. Il est aussi temps de se familiariser avec le poêle qui chauffera la yourte durant notre présence. Les nuits sont fraîches et le feu de bois sera bien nécessaire. Plusieurs couvertures sont également à notre disposition. Estelle utilisera aussi son duvet pour assurer sa sécurité ! Entre la yourte de Сараа et la notre, il y a 5 minutes de marche en comptant le contournement du troupeau et l’observation de la lune qui sera pleine le lendemain. Le vent se lève le soir découvrant ainsi les millions d’étoiles. Aucune ville et pollution lumineuse à des kilomètres à la ronde, le ciel est splendide. Le tsuivan servi le soir est à nouveau un régal. On est à la veille du long week-end pour la fête de l’indépendance. De nouvelles têtes entrent et sortent de la yourte. Ils discutent, rigolent, mangent et nous observent, l’ambiance est à la bonne humeur. La guide et le chauffeur rigolent de leurs histoires survenues avec des groupes de touristes. De notre côté, on parle des aventures vécues par un voyageur de l’extrême rencontré lors du petit-déjeuner à la pension le matin même. Nous les laissons pour aller nous coucher. On est rapidement rejoints par le mari de Сараа qui relance le feu de notre yourte. On ne parle pas un mot de mongol et lui ne parle pas un mot d’anglais. On arrive tout de même à comprendre qu’il se moque de nous par ce que nous avons retirés nos chaussures bien avant de se coucher. Il nous montre aussi qu’on devrait ouvrir nos sacs à dos et enfiler quelques couches supplémentaire ! Il dévoile sa technique pour allumer le feu avec une écorce de bouleau coincée entre deux bûches.




Le vendredi matin, il est temps de crapahuter dans la montagne pour atteindre le monastère voisin. Comme beaucoup de lieux de cultes, il a subit plusieurs démolitions et reconstructions. Le lieu est simple, c’est superbe. Отгоо en profite pour nous présenter quelques aspects du bouddhisme et de la méditation. C’est très agréable de discuter avec elle. En chemin, on observe les rapaces qui nous surveillent. On en aperçoit même certains depuis leur nid. Il semble que le plus rare soit le lamageier. Il a des tâches claires sous les ailes et serait originaire d’autres régions du pays, plus excentrées. Nous arrivons finalement à repérer les cerfs du coin. Sur les quatre, deux ont des bois immenses. Il ne leur faut pas longtemps pour aller se planquer de l’autre côté de la crête. Pendant le repas du midi, on sent l’agitation du week-end festif monter. Les pains du Nadaam qui nous sont servis sont des galettes garnies de viande frites en plusieurs fois. Malgré notre gourmandise, la quantité préparée est bien supérieure à nos capacités. Évidement, il va y avoir la fête ce week-end !




L’après-midi, nous allons enfin voir ces dunes de sable de plus près. C’est assez spécial de se retrouver dans ce que l’on a l’habitude traverser pour aller à la plage. Là, pas de mer à l’horizon ! Le visage de Хурлее est à mourir de rire lorsqu’on lui demande s’il sait nager ! Il dégaine une prière et lève les yeux au ciel 🙏 Par endroits, le sable est gelé. Cela ne se voit pas au premier coup d’œil mais il est en fait dur comme de la pierre. On se promène dans ces dunes en pistant les traces d’animaux. Tout le temps passé avec Отгоо, on discute de pleins de choses sur la culture mongole. On fait des comparaisons avec nos propres repères ou ce que l’on a rencontré en voyageant. Comme le matin, les discussions sont ouvertes et très agréables. En revenant vers le van, on aperçoit quelques chameaux qui se promènent dans leur élément. Sur le retour, un beau rapace nous suit du regard depuis le poste d’observation initialement prévu pour apprécier la faune d’un plan d’eau. La haute saison étant passée, le monde s’inverse. Les touriste sont maintenant bien plus rares que les animaux sauvages et ces derniers peuvent reprendre leurs aises.



Comme nous pouvions le prévoir, le soir est animé sur le campement. De nombreux amis et membres de la famille sont arrivés pour le week-end. Certains sont d’ailleurs déjà complément soûls. Cela reste quand même une ambiance gaie. Estelle est tout de même inquiète par les regards tres curieux de certains hommes. Le repas est de nouveau très bon mais il nous est impossible de nous remémorer ce que nous avons mangé... Ce repas a été l’occasion de découvrir quelques rituels traditionnels mongols. Par exemple, comment présenter et recevoir une fiole contenant du tabac à priser. Ces fioles faites de pierres précieuses sont échangées en guise de formule de politesse, telle une poignée de mains. En rentrant tranquillement se coucher, on est rattrapés par un homme qui crie en courant entre les buissons. Nous avions oublié le Thermos d’eau chaude nouvellement rempli. Et c’est le monsieur qui fixait Estelle qui nous le ramène. Il est en simple pull et doit vraiment avoir froid !


Après un bon petit déjeuner on dit adieu aux amis et à la famille de Сараа. On prend la direction de Хархорин (Karakorum) par la piste derrière la montagne sacrée. On traverse notre deuxième gué gelé. Les chevaux croisés ont l’air sauvages, même si on sait qu’une famille doit veiller sur eux ! Sur la grande plaine avant de rejoindre la route asphaltée, on fait la course avec un troupeau de gazelles. Notre chauffeur accélère pour les faire galoper le plus vite possible. Le van est si rapide que les gazelles bifurquent à angle droit pour nous semer. Arrivés sur la route c’est un renard-lynx qui nous fixe depuis le bas-côté. A l’arrière, on est complètement émerveillés :)


Хархорин semble, comme on l’avait lu, une ville un peu abandonnée à côté de l’enceinte des temples et de la pleine où se situait la splendide capitale du XIIIème siècle. Notre guide semble heureuse de nous accompagner dans le premier temple/yourte puis dans le temple principal, très animé. C’est l’heure du repas, les moines discutent et chantent avant de manger, des hommes se saluent, des touristes mongols parlent fort. On a le droit de goûter au lait de jument fermenté. C’est très chaud et fort en goût, presque piquant.



Nous montons en voiture puis à pieds la montagne de la ville, qui nous offre une superbe vue sur la rivière gelée. Le midi et le soir nous mangeons dans le même restaurant. On pense que c’est le seul endroit ouvert en hivers. Le soir, deux salles privées accueillent des chanteurs de karaoké. Les musiques américaines et coréennes s’enchaînent pour le plaisir des danseurs alcoolisés dans la salle principale. Le contraste ville / campagne est fort. Je crois que nous préférons tous les 4 la chaleur de la yourte aux strass de la ville.


Nous reprenons la direction d’UB pour nous arrêter au parc national Хустай. La yourte qui nous hébergera 2 nuits y est très chaude et confortable. En fin d’après-midi, nous partons à la recherche des chevaux de Przewalski. Le parc a en fait été créé pour ce cheval bien particulier. Cette espèce à part entière n’existait plus à l’état sauvage à la fin du XXème siècle. Sa réintroduction en habitat naturel a été un succès il y a maintenant plusieurs générations. Physiquement, il ressemble à un mélange de cheval et de zèbre. Le poil est beige foncé sur le dessus, clair en dessous. La crinière est raide et reste bien droite. Le bas des pattes peut parfois être zébré. Il semblerait que sa génétique soit complètement séparée de celle du cheval. Il n’aurait pas vraiment évolué depuis l’époque des dinosaures ! Depuis le van, nous croisons plusieurs groupes avec la lumière du jour diminuant. Ils n’ont pas l’air d’avoir peur de nous. Les repas servis au camp ne nous surprennent plus, toujours très savoureux. Elle est loin l’inquiétude culinaire ! Les desserts sont nouveaux cette fois ci : glaces et yaourts au menu ! En allant se coucher, on rigole bien quand Хурлее se rend compte qu’il a laissé la fenêtre de la chambre ouverte. Dehors, le vent s’est levé et la neige tombe en flocons secs.


Le lendemain nous partons à travers les montagnes sans guide ni chauffeur. Il y a du vent et des rayons de soleil entre les nuages. On croise notre premier groupe de cerfs assez tôt, en haut d’une crête. Ils sont une dizaine et s’enfuient vite. Un deuxième groupe nous observe longtemps avant de partir. Un troisième semble trop paisible pour bouger... les cerfs sont alors chassés par une horde de Przewalski sauvages qui dévalent la pente au galop. On se sent loin du monde, en plein dans la nature sauvage. La forêt de bouleaux visiblement cassés par le vent et les roches biscornues participent au caractère fantastique du moment. Dans une autre vallée, c’est plus d’une centaine de cerfs que l’on voit se déplacer vers la rivière en grande partie gelée. Ils détalent à notre vue dans un immense nuage de poussière. Un cavalier déplace un troupeau de moutons et de chevaux. Le vent nous fouette le visage avant que ce soit la neige qui nous rejoigne. On a froid, mais qu’est-ce qu’on est heureux ! Le thé et le feu de la yourte seront quand même d’un grand réconfort après ces 15 km en pleine nature.





Le dernier campement se trouve de l’autre côté de la capitale. Il nous faut donc traverser la zone urbaine et ses embouteillages. En chemin, on s’arrête pour discuter avec un éleveur de rapaces. Et par la même occasion, pour quelques tugriks, en porter un sur le bras. Médy choisi le plus gros des trois, le vautour. Ses ailes font plus de 2 m d’envergure une fois déployées. C’était l’une des seules pauses « tourisme bateau » du séjour. Après quoi, on finit la route vers le parc Терелж (Terelj) au nord-est de UB. Le camp Бувэйт (Buveit) est niché dans une vallée contre la roche. Comme les précédentes, les montagnes sont faites de granite. Mais ici, les formes sont plus originales et marquées. Notre yourte est donc aux pieds d’un soldat mongol endormi avec son casque sur la tête. Plus loin, un hippopotame présente une belle dentition. Le plus beau rocher reste quand même la belle tortue. Seule dans une vallée où s’est arrêtée une rivière gelée entourée d’arbres et buissons.





Dans cette dernière vallée, nous restons trois nuits. Et donc, deux jours entiers plus une demie journée. Les repas sont servis dans une immense yourte pouvant accueillir une trentaine de convives. Le poêle n’est pas en reste pour chauffer un tel volume. Sur place, l’équipe est réduite. Un monsieur et sa fille font tourner la maison à eux deux. Lui s’occupe des travaux et du feu. Elle est en cuisine et gère la yourte restaurant, feu inclus. Les bûches qu’elle y ajoute sont parfois si énormes qu’elles touchent les paroies du poêle, les faisant rougir de chaleur. À nouveau, les repas préparés sont copieux et savoureux. La seule différence ici, c’est que les légumes proviennent du jardin de la société. Le poêle de notre yourte est quant à lui minuscule comparé aux précédents. Il faut ajouter du bois bien plus régulièrement pour conserver la chaleur dans l’habitation. Pas de soucis, une batisse en bois a été détruite pour y construire une piscine à la place. Il y a donc une grande quantité de bois à dispo. Petite pensée à feu (!) la cabane du fond du jardin des parents d’Estelle !



La première journée et demie dans le parc Терелж est pour nous l’occasion d’aller se promener. On marche dans les environs du campement. Ici aussi quelques огоо ponctuent les sommets et forêts. Certains sont même ornés des bannières de paix ou de guerre emblématiques du pays depuis des siècles. Nous visitons également un temple disponible pour les personnes souhaitant venir méditer. Le cadre est paisible. La déesse des lieux est celle de la compassion. Un petit abris de pierres accueille la sculpture d’un ermite renommé devenu tout vert à force de manger de la mousse. C’est vraiment adapté à l’appréciation du silence. On imagine pourtant qu’en été les lieux ne doivent pas être si tranquilles. Il semble que des loups rôdent dans les environs du camp. Nous partons une ou deux fois à leur recherche sans autre résultat que l’observation de quelques empreintes qui pourraient être celles de chiens ou renards.




Lors du dernier jour dans le parc, la température doit être plus douce. La maximale est prévue à -3 degrés ce qui devrait rendre une sortie équestre praticable. Nous partons donc avec nos pic-nic dans le sac pour une journée à cheval. La première montée se fait encordés avec le guide. La monture de Médy ne semble pas très sauvage, il peut chevaucher seul de son côté. La monture d’Estelle, elle, aimerait bien se dégourdir les pattes plus souvent. Elle est donc maintenue proche de Ганаа (Gana) le guide. Sur le chemin, nous nous arrêtons une première fois chez un de ses amis. Il est nomade et sa yourte est installée proche de celle de sa mère. 97 ans apparemment, elle ne les fait pas du tout. Ils rigolent bien puis nous repartons en direction de la vallée de la rivière Туул (Tuul) qui traverse Улаанбаатар à quelques dizaines de kilomètres de là. Après avoir croisé quelques troupeaux, nous partons en direction des bois bordant la rivière. Pour un repas réussi dans ce climat un peu frais, rien de mieux d’un feu de camp ! On collecte ainsi quelques branches mortes et les flammes s’envolent. Il fait chaud, c’est le pied ! L’un des deux chiens qui nous suit tout au long de la ballade respecte quand même une distance de sécurité avec la source de chaleur. Les chevaux non-plus n’aime pas trop cette source de chaleur pas très naturelle. Après le bon repas, notre guide s’allonge par terre proche du feu. Médy fait pareil. Malgré la distance avec les flammes, le sol est très chaud. La fourrure synthétique du manteau en prend un coup... Il est temps de boire un thé chaud. Direction le campement du frère de notre guide. On nous y sert un bon milk-tea mongol qui fait du bien. Un chiot nous aboie dessus comme un fou. Estelle s’éloigne, on n’est jamais trop prudente ! Médy s’approche, un nuage de poussière s’élève quand l’apprenti molosse tourne à toute allure pour s’amuser. La route est encore longue pour rentrer à notre camp. On grimpe les montagnes enneigées. Notre chemin croise les énormes traces de pattes d’un loup qui semble gigantesque. On suit sa piste mais l’animal est invisible, il nous surveille peut-être... Quand la pente se fait trop forte, nous descendons de nos montures pour continuer à pieds. On serpente dans la forêt de bouleaux. C’est comme si aucune civilisation n’existait. Seulement les arbres, la montagne et nous avec nos beaux chevaux qui commencent à transpirer ! La descente se fait à pieds également. Estelle et Ганаа sont obligés d’attendre Médy et son ami. Ce dernier est plus que prudent et souhaite une évaluation exhaustive des chemins possibles. Cela prend ainsi plus de temps de s’arrêter à chaque rocher, chaque tronc d’arbre et chaque virage ! Accessoirement, une pause pipi et une belle herbe à brouter méritent aussi un arrêt. Nous terminons les derniers mètres de la plaine au galop. Ce fut une journée inoubliable !


Malgré les courbatures et la fatigue, Estelle gagne aux osselets la course à cheval, Médy gagne au jeu d’adresse. Notre guide qui avait tout gagné 2 jours avant a l’air fière de nous :) C’est notre dernière nuit en yourte, sûrement avant bien longtemps. Le soir, Médy se charge de raviver les flammes. Un peu trop enthousiaste, le feu est si puissant que des flammes dépassent la cheminée d’environ 50 cm ! Le conduit est entièrement rouge. Le matin, pour qu’Estelle accepte de sortir des duvets et couvertures, Médy réchauffe l’ambiance avec un bon feu de bois. Difficile de mettre nos bagages dans le coffre de notre dernier véhicule (échange de véhicule obligé car le van n’est pas immatriculé pour circuler le vendredi dans la capitale) : le coffre de la Toyota Prius dernière génération est gelé ! Au moment de dire au revoir à nos hôtes, le chef du feu profite d’avoir la main d’Estelle dans la sienne pour l’embarquer avec lui. Son sourire est si malicieux. Cela fait rire tout le monde, notre guide explique que c’est parce qu’elle est trop jolie.


Le retour à UB se fait sous le nuage de pollution, on est partagé entre la tristesse du « au revoir » et le bonheur de retrouver internet, une douche, notre lit dans notre chambre chaude. On se dit que le confort de cette pension qui nous a hébergés 3 fois nous a permis d’apprécier pleinement l’arrière pays. Après le français qui voyage à pieds et en stop, ce sont des américains qui envahissent l’auberge. Ils sont tous volontaires, dispatchés sur l’ensemble de la Mongolie, pour enseigner l’anglais et la santé. Tandis que l’une vit dans une yourte depuis 4 mois, l’autre se vente de pouvoir chauffer l’eau dans son appartement. Tous ont l’air heureux de ce qu’ils font, mais aussi de se retrouver !


La suite du voyage se déroule en Russie. Samedi 1er décembre, il est temps d’embarquer à nouveau dans le transmongolien qui se transformera en transsibérien à Улан-Удэ (Oulan-Oude) après avoir traversé la frontière.